AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de dourvach


Peu de choses à ajouter aux 9 merveilleuses chroniques dues [en leur ordre chronologique] à nos chers Amish d'ici... veronic68 (2013), Woland (2015), kathel, dido600 & mogador83 (2016), Nadouch (2019), pilou62200, oiseaulire & Polars_urbains (2020) : "Maigret s'amuse" millésimé 1957 (terminé dans une villa-palace, le "Golden Gate" de Cannes, en septembre 56) est un petit bout admirable de la Légende urbaine (parisienne, comme on sait) de M. & Mme Maigret.

On se promène tous les jours et l'on tourne un peu en rond à Paris : du boulevard Richard Lenoir au Quai des Orfèvres, évidemment... mais pas que, détrompez-vous ! On s'en va tuer le temps en lisant les journaux et buvant un "jus" bien noir (ou une bière) sur la terrasse permanente d'un rade près de la Place de la République, avec des échappées au Sacré Coeur où l'on monte les marches en couple, voire une longue station dans la pénombre d'un bistroquet de la rue de Charenton et une autre, finale et nocturne chez un Normand face au Quai des Orfèvres.

Pendant les huit chapitres du roman, on épluche les journaux (éditions du matin puis éditions du soir). le "petit Lassagne" est un sacré bon journaliste fouineur et démerdard : "Y a pus qu'à lire"...

On épie ainsi de l'extérieur les faits et gestes de deux Docteurs, parfaits suspects du meurtre d'une pauvre femme mariée retrouvée nue et pliée dans un placard de la pièce (avec lit) derrière le bureau de consultation d'un des docteurs (le remplacé), un parvenu officiant Boulevard Haussmann ; le toubib (d'extraction pauvre) qui fait les "remplas" du médecin rupin est immédiatement soupçonné...

Maigret a été envoyé d'office "en vacances" par son propre docteur (nommé Pardon, un consciencieux) pour... surmenage mais voilà que la nouvelle de l'assassinat de la femme du Docteur tombe dans la Presse et c'est (fatalement) l'inspecteur Janvier qui remplace Maigret... Sous des dehors de "sérénité", contrariété immédiate de ce dernier (qui ne fait point de vélo "pour s'amuser" comme veut le montrer la stupide photo au type en gabardine figurant en page I de couverture du "Livre de Poche" : ça, c'était dans "Le Charretier de la Providence" dans les années trente, et Maigret BOSSAIT en pédalant ainsi le long d'un canal !).

Il va donc se venger de ne pas être au boulot, c'est-à-dire de subir ou plutôt "devoir profiter" de ses vacances estivales en : (1°) décidant de les passer à Paris "pour commencer... " ; (2°) en adressant régulièrement à ce brave Janvier (qui fait le "rempla" maigretien et ose même occuper son bureau !) quelques bonnes vieilles lettres anonymes rédigées en caractères bâtonnets, un poil indicatrices — en forme de gros panneaux indicateurs, s'il faut...

Bref, ici une belle histoire double de remplacés... On plaint les pieds de Mme Maigret (On regrettera TOUJOURS de ne JAMAIS connaître son prénom, de livre en livre : 75 romans & 28 nouvelles appartenant à ladite "Série Maigret" rédigée de 1931 à 1972...) qui soudain déambule à travers Paris en traînant parfois la patte, sur les pas révérés de son Jules d'époux...

Le Maître du Climat : un réverbère s'allume à la tombée de la nuit sur un quai de Seine face au "36", deux-trois mots-matières bien choisis et parfaitement ordonnés, et nous voilà transportés...

Choix des mots les plus humbles, musicalité et rythme soigneux des phrases : tout être parmi les plus ordinaires prendra ainsi vie sous nos yeux...

Tellement loin des "écrivailleurs" qui (de tous temps) veulent absolument "faire littéraire" en compliquant le langage et prenant la pose, loin de ceux aussi qui n'ont d'autre ambition esthétique qu'épater et choquer (toujours mieux) leurs blaireaux/blairottes de lecteurs & lectrices... Sacrés écriveurs en vogue qui, c'est fatal, "en font (ou en feront) des caisses" — en espérant ainsi se distinguer d'autrui... Tels autres filtrant scrupuleusement les "sujets de société en cours" et délayant méticuleusement leur filon... D'autres, Ultimes, jouant leur rôle de Grands philosophes du Siècle...

Simenon est évidemment aussi éloigné des usineurs susdits que des feignasses (parfois les mêmes) utilisant imperturbablement leurs expressions prédigérées et leurs personnages-clichés sans chair ni saveur humaines... C'est que... "Faut plaire à la masse !!! " Ce que leurs éditeurs n'ont même plus besoin de leur susurrer, les bougres ayant intégré ce beau précepte esthétique depuis leurs flamboyants débuts... :-)

L'artisanat solide d'antan est donc devenu "art littéraire" inusable & increvable ? Bah oui, à force d'exigence et d'honnêteté de l'artisan...

Maigret, c'est Simenon : sous les vantardises de l'écrivain, l'humilité de "l'ancien pauvre" Jules, devenu au fil des décennies Commissaire au fameux "36"... Et Mme Maigret "l'Alsacienne" (telle la petite femme stylisée de la Levure Alsa ou de la Chicorée Leroux) en parfaite épouse soumise , évidemment et savoureusement TRES-TRES loin des âpres combats féministes d'aujourd'hui (ni même de ceux, "pré-M.L.F." des lointaines années cinquante)...

Bref, on sourit sans cesse (C'est une honte !!!) et on les aime même et on les envie, tels qu'ils sont, tous les deux "dans leur jus" et leur petit appart' peinard du Boulevard Richard Lenoir [rime] ! :-)
Lien : http://fleuvlitterature.cana..
Commenter  J’apprécie          443



Ont apprécié cette critique (43)voir plus




{* *}