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Critique de GeraldineB


La mondialisation ne va pas sans une certaine forme d'uniformisation culturelle. Et tandis que les modes de vie s'occidentalisent, les langues "s'anglicisent". Ceci est particulièrement flagrant quand vous parlez avec un lycéen. Il y a, dans la langue des jeunes, un appauvrissement évident du vocabulaire et un emploi de mots anglais qui remplacent tout bonnement nos bons vieux mots à nous! Bien sûr, les emprunts lexicaux et les néologismes existent depuis toujours. C'est d'ailleurs ce qui irrigue une langue vivante. Elle doit s'adapter à l'évolution de la société pour continuer à exister. Il me semble pourtant qu'auparavant, les échanges étaient plus équitables. Nous empruntions et nous prêtions des mots. Parfois même ils nous revenaient sous une autre forme, comme la très sympathique expression "conter fleurette", que les anglais nous ont un jour empruntée pour nous la rendre plus tard en forme de "flirt". Il n'y a pas à dire, les anglais ont le sens de l'économie et de l'efficacité lorsqu'ils s'expriment.
Serait-ce aussi pour cette raison que leur langue s'impose dans un monde où tout va de plus en plus vite? Car aujourd'hui, rien ne sert de lire, il faut écrire à point! Et la presse de nous inonder d'informations et de nous enivrer de données chiffrées. Il faut écrire plus vite, comme en témoigne le déluge de nouveaux romans à chaque rentrée. Une maison d'édition ne laissera pas à un auteur qui vient de rencontrer un succès le temps de reprendre souffle. Mais il faut aussi parler plus vite, comme on l'observe sur les ondes. Et tout cela parce que devant l'offre infinie qui se propose au lecteur ou à l'auditeur, il faut à tout prix retenir l'attention. Or le silence et la lenteur n'ont pas cette vertu. Alors si vous aussi la radio vous donne la migraine et si la télé vous agace, éteignez tout et lisez ce réquisitoire salutaire de Jean-Pierre Siméon!

Vivre en poésie c'est aller à l'envers de la vitesse du monde. C'est se poser, reprendre souffle et regarder autour de soi. C'est tout ce que vous ressentez quand vous êtes dans un endroit de nature préservée, un endroit de beauté et de calme. Face à la pression et à l'agressivité de nos sociétés, il existe encore "la possibilité d'une île" et ce sont les poètes qui nous l'offrent. Car la poésie ne court après rien. Elle chemine au long de mots qui, sans elle, tomberaient dans l'oubli. Il n'y a qu'à relire Saint-John Perse pour en goûter toute la magie. La poésie en cela est une forme de résistance face à un monde qui s'accélère et se délite. Jean-Pierre Siméon ne cesse tout au long de son livre de se dresser contre la médiocrité qui nous cerne aujourd'hui. "Nous vivons un temps vulgaire: la seule écoute d'un poème y objecte. Ceci même: le seul fait de dire un poème pour soi-même c'est s'insurger contre la vulgarité du temps et s'éprouver libre par clandestine insoumission."

Alors répondons à l'appel de Jean-Pierre Siméon! Lisons et relisons nos poètes, ceux d'aujourd'hui comme ceux d'hier car la poésie est non seulement universelle mais aussi intemporelle. Et gardons l'oeil et l'esprit ouverts pour accueillir les poètes de demain. Un influenceur poète n'est pas un rêve et la poétesse et féministe Rupi Kaur nous l'a démontré. Certains slameurs aussi. La poésie a toujours été et sera toujours un moyen de faire entendre sa voix et de mettre en mots les plus justes combats. C'est aussi le domaine infini de l'imagination, une fenêtre ouverte sur la beauté du monde.
" La poésie sauvera le monde, si rien le sauve. Au reste, elle le sauve chaque jour de son indignité".
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