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Critique de Presence


Ce tome comprend les épisodes 4 à 7 d'une série indépendante et complète, initialement parue sous la forme de 15 épisodes de mars 2008 à juillet 2012, en noir & blanc. Elle a été intégralement réalisée (scénario, dessins, encrage, lettrage) par Jeff Smith, l'auteur De Bone. Cette histoire a été rééditée en 4 tomes (en noir & blanc) : The drift, The Fire of St. George (épisodes 4 à 7), Romance at the speed of light (épisodes 8 à 11) et The lost journals of Nikola Tesla (épisodes 12 à 15), en format européen.

Ce chapitre s'ouvre avec une autre citation de Nikola Tesla : "La diffusion de la civilisation s'apparente à la propagation d'un feu. D'abord une faible étincelle, puis une flamme vacillante, ensuite un brasier incandescent, augmentant toujours en vitesse et en puissance". La première séquence relate les effets de l'expérience de Philadelphie du 23 octobre 1943 (voir par exemple le Projet Philadelphia, l'expérience interdite). de nos jours, Robert Johnson (RASL) se matérialise dans un barrio de Tucson. Mais il est attendu en embuscade par Salvador Crow (Sal, l'homme au visage de lézard). Une bagarre s'en suit qui s'achève en défaveur de RASL. Sal lui dicte ses conditions : il a 48 heures pour lui, remettre les journaux de Nikola Tesla, faute de quoi il exécutera Annie, l'amie de Johnson.

Deuxième chapitre du récit, c'est l'occasion pour Jeff Smith d'apporter plus de consistance au récit. le lecteur découvre (ou révise) quelques éléments de la vie de Nikola Tesla, ainsi que ses relations avec Franklin Delano Roosevelt pendant la première guerre mondiale, avec Thomas Edison (son premier employeur américain), Guglielmo Marconi, George Westinghouse et JP Morgan (autant de personnages historiques réels). L'évocation de ces éléments historiques est concise et le lecteur pourra bénéficier d'un petit détour par une encyclopédie pour avoir un aperçu plus global de la vie de Nikola Tesla et de ses découvertes, ainsi que de leur portée. de manière habile et crédible, Jeff Smith relie ces éléments à 2 phénomènes historiques (aux origines sujettes à caution) : l'expérience de Philadelphie et l'événement de la Toungouska survenu le 30 juin 1908. Sans être un exposé magistral, Jeff Smith sait faire ressortir les points les plus saillants tels que l'invention de la chaise électrique, et y mêler un petite dose de fiction n'exigeant pas trop de crédulité de la part du lecteur (la demande fait par Roosevelt à Albert Einstein, en marge du projet Manhattan). À sa manière, Smith réhabilite le génie de Tesla y puisant la source de sa fiction (un peu comme le fait Jonathan Hickman avec les Projets Manhattan, en moins poussé). Pour un lecteur qui n'est pas familier des travaux de Tesla, c'est une bonne façon d'entrevoir l'impact qu'il a eu sur l'inconscient culturel américain. Smith va jusqu'à établir un lien discutable avec l'image du savant jouant au démiurge tel qu'il apparaît par exemple dans Frankenstein de 1932.

Mis à part ces passages un peu plus denses, Jeff Smith continue de narrer son thriller, mêlant science d'anticipation, avec une course-poursuite, un personnage principal peu sympathique et pas franchement héroïque, de l'action, des dimensions parallèles (enfin peut-être parce que leur nature est finalement remise en cause), des relations sexuelles consenties (et pour certaines extraconjugales), et l'apparition d'une petite fille à l'expression bizarre.

Ce tome est en noir & blanc comme le précédent. de prime abord, les dessins de Jeff Smith n'ont rien d'exceptionnel : ils racontent l'histoire, sans moment réellement marquant par un visuel élaboré, époustouflant ou très étonnant. Par contre chaque séquence se lit aisément, et Smith sait éviter les clichés narratifs visuels. Sans épater la galerie, il fait preuve d'une maîtrise discrète de l'art séquentiel qui raconte en se mettant au service de l'histoire. Petit à petit, l'émotion naît des visages plutôt marqués des protagonistes, pas toujours avenants. Chaque personnage est absorbé par ses pensées, ayant en tête ses objectifs. Les expressions sont naturelles, sans exagération, et très parlante. Cela permet au lecteur de ressentir les émotions de chacun, et de s'identifier avec la concentration des uns et des autres. Cette façon simple en apparence de dessiner les visages finit par rendre les personnages plus proches, par faciliter l'empathie, et les émotions devant un visage tuméfié. En entremêlant un quotidien prosaïque avec les éléments plus fantastiques, Smith transfère une partie de la normalité (véhicules, ameublement, tenues vestimentaires) sur les inventions d'anticipation, les rendant plus facilement acceptables. En feuilletant après coup le tome, le lecteur distingue des images qui prises isolément se révèlent plus marquantes : le survivant sur le radeau à la dérive (avec le fort contraste d'ombre et de lumière), le visage étrangement allongé de Sal avec son rictus, le visage ahuri de l'enfant, la présence discrète des cactus, l'avant d'une voiture ressemblant à une tête de monstre montrant les dents (dernière image de l'épisode 4), Johnson en train d'essuyer le sang sur son visage, les expressions ambigües d'Uma Giles (la contrepartie de Maya), etc. Jeff Smith n'est pas un artiste qui en met plein la vue avec des pleines pages débordant d'énergie ; il est plutôt un artiste qui s'efface derrière l'histoire, tout en glissant presque subrepticement, des images dont la personnalité renforce discrètement l'ambiance du récit.

Cette deuxième partie est aussi agréable à lire que la première, un peu plus dense en termes narratifs puisque Jeff Smith fournit plus d'éléments sur Nikola Tesla et ses travaux, sans rien perdre de la tension du thriller.
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