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Critique de Gataloca


Je referme à l'instant ce roman autobiographique qui ne ressemble à rien de ce que j'ai lu et qui est, par sa franchise déconcertante, une fascinante démonstration de ce qu'est le pacte autobiographique. Mais au-delà de cette sincérité presque cassante, ce que j'ai aimé tient surtout à l'originalité de la démarche, presque science-fictionnelle : la narratrice ne s'adresse pas à ses lecteurs, mais à son Moi adolescent. Jamais inclus dans la conversation, le lecteur est un témoin extérieur, peut-être un peu voyeur même, car si la narratrice sait ce qu'elle fait, l'adolescente dont elle dévoile les angoisses et les frasques, notamment à travers des reproductions de ses carnets intimes, n'a jamais dit qu'elle était consentante... cette remarque apparait d'ailleurs dans l'un des passages du livre.

Avec cette dissociation un peu schizophrène, l'autrice se pose à la fois en Moi vieilli, plus sage, consolateur et rassurant (dans le genre "Tiens bon, le meilleur est à venir") pour son Moi plus jeune, et en adulte de référence pour tous les lecteurs adolescents à qui elle va certainement apparaître comme celle qui est, enfin, à même de leur dire la vérité sur le sujet qui les préoccupe le plus a l'heure de la puberté : le sexe.
Car oui, il est beaucoup question de sexe dans le roman - ce sont même les deux mots par lesquels s'ouvre le chapitre I - plus in media res que ça tu meurs, on est au coeur du sujet : le sexe. Je te promets de te dire tout ce que tu as toujours voulu savoir sur le sexe sans jamais oser le demander, dit à la narratrice à son Moi adolescent. Et c'est là que la mise à distance du lecteur est redoutablement intelligente, car le lecteur ou la lectrice adolescent.e tend l'oreille, fortement intéressé.e, mais drôlement moins perturbé.e que si on s'adressait directement à lui/elle... ceci n'est pas un livre de sciences naturelles ou une brochure sur la sexualité distribuée par l'infirmière du collège.
Alors combien de lecteurs de 13 ou 14 ans dévoreront ce livre, pour cette promesse (tenue), mais aussi pour l'autre (tu verras, la vie, ça va bien se passer, et surtout ça va bien se finir) ? L'autrice ne cache en effet rien non plus des pulsions morbides de cette autre Elle, et délivre finalement un message d'espoir qui est d'autant plus crédible qu'il n'est pas gnangnan ni ne surestime la vie : rien n'est particulièrement facile, surtout pour une fille qui grandit dans une société patriarcale. Bref cette autrice, on a envie de la croire et même mieux que ça : on la croit. Et voici une lecture qui peut sauver des vies...
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