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Critique de frandj


A. Soljenitsyne a écrit ce livre alors qu'il était encore presque inconnu. Comme c'est souvent le cas, il y a une part d'autobiographie dans ce roman. On y trouve l'unité de lieu (un hôpital dans l'une des républiques soviétiques), de temps (quelques mois dans les années '50) et d'action (le cancer). Quelques pages évoquent aussi une petite colonie de Russes, relégués dans un trou perdu après un passage dans un camp de travail; c'est une situation que l'auteur a aussi connue.

Soljenitsyne s'ingénie à mettre en scène des personnages très divers, représentant l'ensemble de la société soviétique. Mais deux principaux personnages émergent. Roussanov est un apparatchik communiste important (et convaincu de l'être, certes !); Kostoglotov, surnommé "Grandegueule", est un rude gaillard qui est passé par le Goulag; il est campé sans complaisance, alors qu'il représente certainement l'auteur lui-même.
Les personnages secondaires sont nombreux, ils sont d'âge, d'origine et de mentalité très variés; certains sont attachants. le personnel soignant joue un rôle de premier plan, notamment une doctoresse (Vera). C'est par sa résistance aux propositions de traitement que Kostoglotov noue un lien particulier avec Vera. Mais l'auteur est très pudique à l'égard du sentiment amoureux, a fortiori au sujet du sexe: la relation restera platonique.

Ce que je trouve surtout remarquable, c'est d'évoquer l'immense société soviétique à travers un microcosme bien particulier, aux limites bien définies. Les lecteurs ont donc accès à une Russie qui est complètement obsolète, mais qu'on devrait pourtant conserver en mémoire. Les personnages, quoique très éloignés de ceux que nous côtoyons ici au quotidien, sont intéressants et nous disent souvent quelque chose qui peut nous toucher. La maladie, qui (bon gré mal gré) sert de trait d'union à tous les protagonistes, apparait comme une entité omniprésente et presque "métaphysique" - qui n'empêche pas, cependant, le développement de la vie des individus au quotidien. le contexte politique est essentiel, mais qu'on ne s'attende pas à un réquisitoire anti-communiste. On peut juste imaginer que Soljenitsyne "boit du petit lait" en décrivant l'incrédulité et l'inquiétude de Roussanov au moment où celui-ci apprend le début de la déstalinisation !

Le livre (en deux parties) pourra paraitre un peu long aux lecteurs pressés. En effet, comme tous les autres grands romanciers russes, l'auteur a besoin d'ampleur et d'exhaustivité. Quant à son écriture, elle est très caractéristique: concrète, un peu terre-à-terre, presque sans joliesse de style. Mais en définitive, "Le pavillon des cancéreux" reste une grande oeuvre.
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