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Critique de ATOS


ATOS
16 décembre 2014
Le ventriloque. L'homme et son autre. L'animé ,l'inanimé , la voix et la parole. Tout ce mélange un peu dans ce couple infernal.
Qui pense dans la tête de la poupée ? Qui parle dans le ventre de l'homme ? C'est peut être une question de niveau de langage, de profondeur peut être.
Le ventriloque, l'homme orchestre des voix, personnage récurent de l'âge d'or du music-hall.
Le pantin, le fou de la voix, celui qui peut tout dire parce qu'il est bien plus que ce qu'on en voit. Ce double singulier.
La poupée, ce double de papier mâché, est un concept qui dépasse celui de la marionnette.
Et dans la plus part des cas, c'est elle, la poupée qui est maîtresse de la parole.
C'est elle qui manipule et tout l'art du ventriloque se joue là, créer l'illusion de la plus parfaite autonomie psychique de la poupée.
On s'y perd. On s'y perd depuis fort longtemps. Ainsi Louis Comte, grand artiste du 19e siècle, célèbre prestidigitateur et ventriloque a t il été à deux doigts de brûler sur le bûcher que ces compatriotes helvétiques s'apprêtaient à dresser en son honneur.
Ventriloquie, magie, il n'y a pas véritablement de frontière.
Gabbo le ventriloque, dans le film de James Cruz en 1929, perdra la raison. Arnold Wesker personnage de comics finira à l'asile, après avoir insufflé toute sa haine à sa poupée Scarface lui injectant ainsi sa propre folie.
Manipulation, perte de contrôle, voilà ce qui fait peur dans ce jeu. La représentation des voix intérieures, cette intériorité d'une parole venue du fond de nos entrailles et qui se met à raisonner dans nos salles.
Du ventre. du coeur au ventre. Il faut garder cela à l'esprit pour ne pas y perdre son âme.

« Les garçons ». Londres. 1930-1970- Saga d'une dynastie d'artistes.
Evie, l'arrière grand mère, dite « Echo Endor », artiste ventriloque de génie. Joe, le grand père, ventriloque « trompe la mort », Queenie , la grand mère, ventriloque des jardins d'enfants, Frankie la mère, comédienne , et George.
George qui hérite de toute une histoire, et d'un prénom, le prénom du « garçon » de Joe.
Garçon qui fut imposé par Evie à Joe. Comme Evie lui imposa Queenie.
Et comme elle leur imposa à tous le silence sur ce qui ne doit jamais être dit.
Beaucoup d'amour, beaucoup de douleurs, énormément de silence.
Les poupées conservent la mémoire de ceux qui gardent le silence.
La folie n'est évidement pas dans les poupées, elle est bien là où sont les voix.
Dans le corps de ceux qui manipulent, de ceux qui se laissent manipuler, et dans ceux qui se taisent.

Le précédent roman, de Wesley Stace, « l'Infortunée » nous emmenait à la rencontre de l'affirmation d'une identité, à la conciliance d'un double que l'autre ne veut vous reconnaître, « Les garçons » nous dévoile toute l'intolérance qui peut naître de l'imposture d'un double que l'autre vous impose.
Autre angle d'approche, mais donc finalement sujets étroitement liés.
La construction d'un diptyque aux visages inversés mais non opposés.

Astrid Shriqui Garain
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