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Critique de Bigmammy


Je n'apprécie pas beaucoup les historiens qui écrivent avec hargne. Même si la thèse qu'ils défendent est bien étayée, parfois éclairante, novatrice. Voici donc un ouvrage qui se situe à l'opposé de l'excellent livre de Paul Veyne « Quand notre monde est devenu chrétien ».
Ici, l'approche se veut essentiellement économique : comment le catholicisme a favorisé le basculement de pouvoir entre deux classes sociales, au tournant du IVème siècle. L'Empire romain classique était fondé sur le système esclavagiste : près de 40% de la population était constituée d'esclaves raflés lors des conquêtes. Il advint qu'une fois les limites du monde utile conquis par l'armée romaine atteintes, la source d'approvisionnement de cette main-d'oeuvre bon marché tarit, fait aggravé par la liberté générale de moeurs entravant la reproduction naturelle du « stock », le système tant prisé par la caste des sénateurs périclita. Une nouvelle caste dirigeante, celle de valeureux militaires distingués par l'Empereur et rémunérés par des terres, supplanta les anciens maîtres. L'esclavage fut peu à peu remplacé par le système du colonat, par lequel des hommes libres prennent à bail de long terme (un système comparable au métayage), les manses rattachées aux immenses latifundiae. Et pour faire accepter à des hommes libres la nécessité du travail (une activité considérée comme vile par la culture greco-romaine), de soumission aux nouveaux maîtres, d'attachement à la terre et d'encouragement à la natalité dans le strict cadre du mariage, le christianisme fut utilisé comme une entreprise de conversion forcée des masses, ayant assuré à la nouvelle classe dirigeante la docilité des paysans.
Le livre quitte effectivement bien vite le style universitaire pour se faire propagandiste, pourfendeur du christianisme à tous les niveaux. Les persécutions subies par les premiers chrétiens : bien peu de victimes, bien moins que les ravages causés par la fureur des conversions forcées … Saint Augustin : un sinistre personnage, comme Constantin, tous deux voués aux gémonies. Seuls empereurs portés aux nues : Dioclétien et Julien.
Trois transformations de la société romaine traditionnelle sont donc intervenues au cours du IVème siècle :
- L'instauration du christianisme comme religion d'Etat,
- L'imposition d'une dictature militaire totalitaire, avec installation au sein des villes des troupes auparavant cantonnées aux frontières, pour assurer le maintien de l'ordre nécessaire à la répression des fréquentes rebellions de la misère, causées par l'accroissement énorme de la pauvreté,
- La substitution du colonat à l'ancien système de l'esclavage, où finalement, les hommes étaient mieux traités (p.222, puis p. 240)
Page 259, une légère nuance tout de même, comme l'expression d'un tardif remord : « On ne peut pas prétendre que ce soit le christianisme, en tant que religion, qui aurait été directement la cause de la chute (de l'empire romain) ; mais c'est bien cependant la prise en main de l'empire par les seigneurs chrétiens et, en conséquence, la mise en place d'un Etat intégriste qui fut à l'origine de cette fragilisation puis cet effondrement de l'empire romain d'Occident face aux assaillants. »
A lire quand même, mais avec des pincettes, pour mieux comprendre l'origine du système féodal qui s'instaure en Europe sur les décombres de l'empire romain.

Lien : http://www.bigmammy.fr
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