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Critique de moussk12


Comme l'explique bien l'auteur, le silence n'est pas synonyme d'une absence de sons, il n'est pas un vide et il est à distinguer du mot « bruit ». Enseignant, chercheur et spécialisé en écoacoustique, Jérôme Sueur nous apprend dans cet essai les différences entre la biophonie qui représente les sons naturels de la faune, la géophonie, les sons des éléments que sont l'eau, le vent, la montagne et l'anthropophonie : les bruits d'origine humaine (machines, véhicules, appareils,…). « L'homme n'aime pas le bruit mais aime faire du bruit », c'est la preuve de son existence.
Tout son provient d'un mouvement qui entraîne des vibrations : le vol d'un oiseau, le vent dans les arbres,.. et chaque onde, chaque vibration est calculée en amplitude, durée, fréquence et phase. Les enregistrements sonores sont ensuite transformés en images qui permettent de les étudier. C'est ce qu'on appelle l'image sonore ou sonogramme. Pression sonore, décibels, mathématiques, espace abiotique, comme tout cela est sérieux et complexe.
Heureusement, l'auteur a eu la bonne idée d'introduire chaque chapitre par une petite histoire personnelle dans ses recherches et voyages, par une anecdote qui a rendu la lecture plus attrayante pour un novice comme moi. Sans cela, j'aurai peut-être abandonné. D'autant plus que ses sujets de prédilection sont les insectes (cigales, criquets, sauterelles) et les amphibiens, avant les oiseaux et les mammifères. J'aurais bien aimé en savoir un peu plus sur les éléphants, par exemple. Mais bon, on ne peut pas tout avoir.
C'est au coeur des forêts, aux quatre coins de la planète, que se concentrent les études des silences. Parce qu'il y a plusieurs sortes de silences et les analyser et les comprendre peut représenter un travail de toute une vie.
Le silence des prédateurs les aident à chasser et à se nourrir. En contrepartie, le silence des proies est un silence de survie : réduire les sons, les chants, les stridulations permet de ne pas se faire repérer.
Le silence est également un bon outil pour la recherche du partenaire sexuel, dont la durée diffère suivant l'espèce animale.
Il peut être aussi un silence collectif entre deux groupes, avant la bataille pour conquérir un territoire.
Imposer le silence à ses petits permet à l'oiseau ou au rongeur de survivre face à l'approche du prédateur. Tandis que chez l'humain, imposer le silence est une soumission à l'autorité.
Cela n'est pas donné à tout le monde d'écouter le silence ; seul un naturaliste pourra l'atteindre car pour y parvenir, il vous faudra suivre les trois règles suivantes : l'éloignement (loin des activités humaines, sources de bruit), la solitude (même à deux, on ne peut s'empêcher de parler à un moment ou à un autre) et l'immobilité (se fondre dans l'espace naturel et éviter tout mouvement).
Enfin, l'auteur termine par un court chapitre sur le confinement de quelques semaines qui a permis à beaucoup de retrouver un silence naturel, c'est-à-dire un silence plein des sons de chants d'oiseaux, d'une rivière qui coule, du bruissement du feuillage. Ce silence naturel peut avoir apporté quiétude, tandis qu'un silence vide, sans aucun sons de la nature, est angoissant.

Tout ceci paraît bien intéressant. Effectivement, ça l'est.
Mais alors, pourquoi ces deux étoiles ? Parce qu'au dernier chapitre, j'ai bondi de mon fauteuil et de gros doutes me sont venus sur l'intention de l'auteur : transmettre son savoir et partager ses connaissances ou faire de la morale à deux sous ? Ce chapitre intitulé « Garder le silence » montre son inquiétude sur l'augmentation de sources sonores humaines provoquant la disparition d'espèces animales. Tout cela est à son honneur. Toutefois, voilà qu'intervient du prêchi-prêcha car il tente de donner des solutions uniquement dirigées vers l'individu que nous sommes et non à l'échelle politique ou économique. Arrêtez de nous culpabiliser, y en a marre ! Monsieur Sueur veut nous apprendre à vivre, nous éduquer dans nos gestes et nos mouvements. A quoi pense-t-il ? Peut-être à ce que l'on prenne un vélo pour aller travailler ? Ou tous à la voiture électrique ? C'est pratique, dans nos pays nous ne verrons que les belles voitures silencieuses, mais les composants ultra polluants des batteries seront extraits de nouvelles mines, bien sûr à l'étranger et avec les mains de pauvres bougres, esclaves modernes. Pourtant, l'auteur nous narre tout au long de son livre ses nombreux déplacements en avion. Avions qui, il l'explique haut et fort, sont l'une des pollutions sonores les plus importantes. Bref, faites ce que je dis, pas ce que je fais.

Et le pompon est sa conclusion se terminant par un mot :
« Chut ! »
Non pas « chuuuut » que l'on visualise bien avec un doigt devant la bouche, chuchoté avec douceur. Noooon. Une injonction. Un ordre. Tiens, tiens, j'ai lu clairement dans ce livre qu'imposer le silence pour l'Homme, c'est vouloir soumettre l'autre à une autorité. Je me suis revue sur les bancs de l'école...

Monsieur Sueur aurait dû se limiter à son essai scientifique, jusqu'à la page 235.

« Chut ! »

Alors, je me tais, je lis et j'écris, en silence.
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