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Critique de zazy


« Aujourd'hui la guerre a commencé. À moins que ce ne soit il y a longtemps. Je ne comprends pas très bien quand les choses commencent. Elles m'environnent d'un seul coup et ressemblent à des personnes que j'aurais toujours connues. » Ainsi débute le récit de cette petite fille de 7 ans qui habite à La Laguna sur une île des Canaries. Les soldats franquistes cherchent, avec une grande violence, son père journaliste républicain. « Pauvre papa ! Je pense qu'un jour les hommes à bérets rouges le renverseront comme ils ont renversé les fougères. » D'un seul coup, tout son petit monde de douceur, de sécurité avec son père qu'elle adore s'écroule soudainement. La petite fille vieillit d'un seul coup « Une guerre peut empêcher les enfants de grandir quoique les enfants ne luttent pas, n'aient pas de prison et durent plus longtemps. Les enfants peuvent attendre ».Elle connaîtra les visites à la prison, les procès iniques, la violence, la pauvreté…. Elle connaîtra la déchéance sociale de ceux qui ne sont plus du bon côté. Elle va voir les « amis » de son père, ceux qui venaient souvent à la maison accuser son père pendant les procès. le pire ce sera l'attente de l'exécution, la peur de lire le nom de son père sur la liste « Sans papa je suis toujours seule ». Un jour, le télégramme fatidique est arrivé, un pli qu'elle doit lire tant la mère est ravagée, surtout depuis la mort du petit frère. Un dialogue déchirant entre la mère et la petite fille, un dialogue à la limité de la folie, qui m'a pris aux tripes. « EXILE – ILE DE FER – QUARANTE ANS – STOP ». Cela signifie la mort « C'est le grand vent qui couvre la puanteur du peloton, dans ce ravin où je voudrais qu'on ne jette jamais le corps de papa. J'irai là-bas. Et le grand montera jusqu'à moi en tourbillonnant. Et moi, je serai là à regarder, à regarder vers le fond du ravin. » Ce ravin, c'est ici que l'on jette, outre les ordures, les cadavres de ceux qui sont passés par le peloton d'exécution, les prisonniers morts. « Je sais maintenant qu'on appelle « peloton » un groupe de prisonniers qu'on a conduits au Tanqueabajo. le tanqueabajo est un ravin immense, couvert de végétation, où l'on jette les cadavres des animaux et les ordures de toute la ville. Après les avoir tués, on les y abandonne et ils restent à pourrir là sans que leurs familles soient prévenues. »
La guerre civile est focalisée par ce ravin qui est également l'espace qui la sépare entre hier, la paix, une enfance heureuse et demain, l'angoisse, la peur, l'absence…. le puits profond où s'enfonce sa mère. Heureusement, il y a le grand-père bourrelier, celui vers qui elle se réfugie, qui lui permet de redevenir ou rester une petite fille alors que la mère veut en faire une grande personne.

Dans ce livre d'une grande beauté poétique, Nivaria Tejera fait parler la petite fille qu'elle était à travers ses souvenirs. Par petites touches, elle dessine son entourage, la grande maison, puis les autres, celle du grand-père adoré où elles vivront, la tante qui coud à la machine, le grand-père, la prison, le collège, l'absence, la peur, les procès, les visites à la prison puis au camp de concentration où se trouve son père … autant de petits tableaux impressionnistes qui impressionnèrent la lectrice que je suis.

Ce livre vous prend aux tripes, touche ce que nous avons de pus profond, un vrai diamant. Ce livre ne se laisse pas oublier, les mots restent dans la tête, durs et limpides comme les explications de la petite fille.


La postface raconte la « petite histoire d'un grand livre » où comment ce roman est arrivé sur le bureau de Claude Couffon, traduit à la demande de Maurice Nadeau pour publication. A sa sortie il fut salué par Max-Pol Fouchet, Robert Sabatier, André Wurmser et d'autres.

Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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