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Critique de kuroineko


Difficile de se dire que ce court ouvrage est issu de l'esprit d'un adolescent de seulement 16 ans. Et pourtant...
Comme dans tous premiers romans, il reste des perspectives à affiner dans des oeuvres ultérieures. Il n'en reste pas moins effarant de constater déjà chez le jeune John Kennedy Toole une remarquable maîtrise de la narration.

Le récit passe par la bouche du narrateur, David, depuis son enfance jusqu'aux prémices de l'âge adulte, dans l'Amérique des années 1940 et 1950. Il se déroule dans une petite bourgade américaine prise entre des collines, formant une sorte de creuset où mijotent sans trêve bigoterie et commérages. On n'aime pas ce qui sort de l'ordinaire, pas plus que tout ce qui vient d'ailleurs. Cet "ailleurs" aux allures barbares démarrant au-delà des collines environnant ce vase clos. Déjà, les gens des hauteurs apparaissent comme des citoyens de seconde zone car de catégories sociales plus précaires. Ne pouvant payer l'impôt paroissial, ils se retrouvent exclus des registres du pasteur, des célébrations religieuses et, partant, de la communauté. Car c'est bien la religion, ou plus exactement la religiosité, qui cimente le corps social de la commune. Avec toute la censure que cela suppose (cf. notamment ce qu'il advint de l'exemplaire du roman Autant en emporte le vent de la bibliothèque municipale ou les manifestations contre les séances de cinéma).

Dès ce premier roman, Toole démontre une qualité indéniable pour croquer des portraits truculents, procédé qu'il reprendra également dans La Conjuration des imbéciles. La tante Mae est tout particulièrement savoureuse avec ses rondeurs égayées de tenues excentriques, masquant sous des faux airs de Jean Harlow une réalité qui fut trop souvent sordide. J'ai infiniment apprécié ce personnage haut en couleur et d'une attachante profondeur.
Au contraire de l'institutrice sadique, épouse de l'assistant du pasteur qui voit le péché dans chaque activité de la vie. de complexion sèche et osseuse, la professeur offre une parfaite antithèse de la ronde Mae. De ses lèvres minces et pincées ne semblent s'écouler que sarcasmes et méchancetés (et une haleine de fosse d'aisance).


J'ai entrepris cette lecture, attirée par le titre et par les chroniques élogieuses lues sur Babelio. Un merci à tous ces auteurs de critiques pour cette belle découverte. J'ai tout d'abord découvert, dans la préface, la vie si courte de l'auteur et le dévouement sans trêve de sa mère à le voir publié de façon posthume. Et j'ai été emballée dès les premières par ce mélange d'acuité et de candeur, voire de naïveté, que John Kennedy Toole met dans la bouche de son narrateur. Il m'a fait penser par moments à Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur d'Harper Lee.
Récit d'apprentissage de la vie autant qu'observation d'une communauté rurale, la fin m'a prise par surprise.

Ce roman mérite une attention et des éloges pour le talent de son si jeune auteur.
Je ne puis que le recommander chaleureusement.
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