L’idée que je puisse plutôt faire bon usage de cette bizarrerie de caractère, m’en servir pour aider quelqu’un au lieu de lui faire du mal, allume une lueur d’espoir dans mon cœur. Je m’efforce de l’ignorer. L’espoir est dangereux. L’espoir nourrit des attentes qui engendrent la déception. Être déçue par les autres est déjà difficile, mais il n’y a rien de plus dur qu’être déçue par soi-même. Je n’imagine pas que ma déception puisse provenir des autres. Non. Je suis ma propre tueuse idéale. Cet espoir, cette étincelle qui me laisse penser que je pourrais aspirer à quelque chose de plus noble que le mal, je vais leur faire goûter la saveur de la déception. Être lâchée par les autres, c’est une douceur ; le pire est d’être rejetée par sa propre âme. Et je me demande ce qui est le plus triste : m’attendre à échouer ou avoir trop peur pour rêver de réussir.
Chaque homme, se propose un idéal quelconque et s’y attache plus ou moins toute sa vie. Le mien a été la philanthropie. Je désirais gagner beaucoup d’argent afin de pouvoir aider les autres.
Le pseudo des clients peut en dire long sur leur personnalité. Quand le pseudo est descriptif comme DoctorPat92 ou AvocatHot, il désigne souvent ce qu'ils sont ou auraient voulu être.
Je n'ai touché personne depuis trois ans. Ca peut sembler difficile sur le plan pratique, mais ce n'est pas le cas. Ce n'est plus le cas grâce à Internet.
Se déshabiller est un acte quotidien. La plupart des femmes le font sans y prêter attention, comme une succession de gestes automatiques aboutissant à un résultat.
Il me croit faible. Il croit qu'il peut me manipuler, me soumettre à sa volonté. Me tuer, comme il a tué tant d'autres filles avant moi. Il n'imagine pas une seconde que, derrière mon visage délicat et mon corps menu, se cache un mal qui rivalise avec le sien.
Une vie entre mes mains. 72 secondes
124 secondes.
648 secondes : je glisse par terre et me tords les poignets en voyant le couteau étinceler dans la pénombre.
793 secondes : je colle mon oreille à la porte dans l'attente d'un bruit, d'un indice sur ce qui est en train de se passer.
921 secondes.
1122 secondes : je lâche mon poignard et je sens des larmes rouler sur mes joues.
1400 secondes : je m'endors nue contre la porte, recroquevillée sur moi-même, ma tête inclinée selon un angle inconfortable.
Malgré ma stupidité, il y a tout de même une chose que j’ai gardée de mes élans amoureux pour Francis : ma virginité. Son dévouement total envers ma personne et sa présence amicale constante quand nous ne sortions plus ensemble m’ont permis de rester ferme avec mes petits copains et m’ont donné assez de confiance pour ne pas me laisser bercer par des paroles enjôleuses ou presser par des mains insistantes.
J’ai beau m’être autoproclamée fille la plus chaude d’Amérique, je suis toujours vierge.
Ce n’est pas une volonté délibérée de ma part.
Les clients n’ont pas envie de se dire qu’ils sont un homme parmi tant d’autres. Ils préfèrent imaginer une fille dans sa chambre, sans personne autour, qui veut avoir affaire à eux seuls. Le fait que je parle ajoute certainement à ma popularité, de même que ma nationalité américaine – une bizarrerie en soi. La première raison de mon refus de taper au clavier, c’est donc le client. L’autre raison, c’est que pianoter tout en se masturbant est un exercice vraiment difficile, en tout cas pour moi. Les hommes ne paraissent pas avoir ce genre de problème.