AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Sofiert



Il n'est parfois pas nécessaire de trouver une idée neuve pour faire un bon roman.
Paul Trembley a choisi pour son thriller le décor bien classique de la cabane perdu au fond des bois. Avec une famille bien sympathique en vacances et des intrus qui vont leur faire vivre un enfer.
Pour présenter cette famille parfaite, il commence par décrire une jolie petite fille qui joue dans un jardin bucolique et ensoleillé à observer les sauterelles. D'emblée le lecteur s'installe dans ce décor idyllique et s'identifie aux émotions agréables ressenties par la fillette. La première information d'importance, c'est que cette petite fille a deux papas, et on devine alors que l'homophobie pourrait jouer un rôle.
De manière à désorienter le lecteur, il dresse un portrait positif de Léonard, le premier intrus qui va séduire une enfant dont le jugement semble plutôt fiable. En découvrant Léonard avec les yeux de Wen, on voit un jeune homme séduisant, chaleureux, attentionné et surtout sincère. Mais en même temps, si on a lu la 4ème de couverture, on sait que le roman est un thriller.
Donc quelque chose ne colle pas, d'autant plus que l'étranger est toujours celui qui dérange et que celui qui veut pénétrer dans le refuge est nécessairement indésirable. Dès à présent, l'auteur réussit à brouiller les pistes et à desemparer le lecteur. L'urgence de la situation et l'apparente sincérité de Leonard instiilent le doute.
“Tes pères ne voudront pas nous laisser entrer, Wen. Mais il le faut. Dis-leur qu'ils le doivent. Nous ne sommes pas venus pour vous faire du mal. Nous avons besoin de votre aide pour sauver le monde. S'il te plaît.”

Après l'apparition des 3 autres personnages et leur intrusion dans la cabane, l'intrigue bascule rapidement dans l'horreur avec la violence, le sang et la mort.
Mais ces intrus ne sont pas des méchants ordinaires. Ils prétendent agir pour le bien de l'humanité puisque Dieu leur aurait donné la possibilité de sauver le monde en échange du sacrifice volontaire d'un membre de la famille. Dite de cette manière, l'annonce a tout d'une derive sectaire ou d'une conspiration.
Le talent de Paul Tremblay consiste justement à rendre cette déclaration crédible ou tout au moins à semer le doute. En écho à l'inquiétude d'Éric, celui qui est croyant, le lecteur s'interroge également sur la fiabilité des indices diffusés à la télévision. Mais le lecteur est également réceptif aux arguments plus rationnels d'Andrew qui penche pour la conspiration.
" Ils font partie d'une secte. Voilà tout. Une secte homophobe attendant la fin du monde. Leur identité, le sens et le but de leur vie se fondent sur cette croyance : ils savent que la fin est proche. Et en plus, ces petits soldats de dieu, leur dieu, croient avoir le pouvoir d'empêcher l'apocalypse s'ils peuvent forcer des gays à se faire mal entre eux. "

C'est donc en nous prenant au piège, sur cette frontière entre roman apocalyptique et thriller, que l'auteur réussit à renouveler le genre de la cabane au bout du monde. Il excelle à créer cette atmosphère malsaine et ambiguë dans un huis-clos étouffant qui interroge le lecteur. Car il s'agit aussi de permettre de comprendre comment fonctionnent les théories conspirationnistes : comment résister à la force de conviction de fanatiques prêts à tout, comment éviter de donner du sens à des événements qui ne sont que coïncidences, comment résister à la croyance quand on est dans l'émotion ?
Commenter  J’apprécie          160



Ont apprécié cette critique (16)voir plus




{* *}