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Critique de jeff2u12


En tant que document, ce livre est précieux, puisqu'il donne le point de vue d'un des chefs bolcheviks du début des années 20 (parution 1924).
En tant que lecture, il est indéniable que Trotsky sait à la fois tourner ses phrases et construire son raisonnement et ses arguments.
Sur le fond, ses critères d'appréciation et de jugement de valeur de la littérature soviétique sont à la fois très ouvert d'esprit et en même temps très critiques pour l'ensemble de ceux qui passent à la moulinette de son champ d'étude : à part Pilniak et Vsevolod Ivanov qui s'en sortent à peu près bien, la plupart des auteurs du début XXème en prennent pour leur grade, particulièrement pour leur manque de considération pour les soubresauts de la société qui les entourent.
Mention spéciale pour Biely, Chklovski, les décadents, futuristes et formalistes de tout poil qui osent prétendre que l'art peut exister indépendamment de la réalité sociale. Idem pour la littérature de l'émigration, qu'il s'agisse d'un Bounine au style surrané (pas faux) ou d'un Remizov trop porté sur la mythologie de la Russie traditionnelle (pas d'accord). Leonid Andreiev et les partisans de la révolution qui ont ensuite vertement critiqué la dérive dictatoriale sont également traités de noms d'oiseaux.
L'écriture est magnifique mais malheureusement, la critique prend souvent le mode du persiflage qui finit par devenir assez désagréable. de plus, certains passages sortent du sujet et Trostsky ne peut s'empècher de partir dans de longues dérives de propagande révolutionnaire où la littérature n'est plus vraiment concernée.

Mais le plus étonnant est l'article de 1933 portant sur le Voyage de Céline -qui vient tout juste de paraitre - et qu'il qualifie d'oeuvre révolutionnaire - avec bémols. le situant dans la longue lignée du roman français depuis Rabelais, "une magnifique dynastie de maîtres de la prose épique s'est ramifiée durant quatre siècles, depuis le rire énorme jusqu'au désespoir et à la désolation, depuis l'aube éclatante jusqu'au bout de la nuit", tout en relevant que le désespoir mène à la résignation. trotsky juge que "Céline, qu'il le veuille ou non, se fait finalement l'allié de Poincaré et de l'ordre établi". Un jugement qu'on ne peut que qualifier de visionnaire !

Un livre à lire, sans conteste, et qui donne une idée, si besoin était, du niveau intellectuel et de la force de travail d'un révolutionnaire de haute culture - qui aurait pu prendre la succession de Lénine si....
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