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Critique de Dixie39


Lire ce livre, c'est évoluer dans un rêve. On est là, le soleil brûlant la peau entre deux déluges d'averse, trimbalant notre corps accablé par cette moiteur jusqu'alors inconnue, dans les rues de la Havane. On déambule, un guide touristique à la main, parcourant les rues et les lieux saturés de bruits, d'odeurs acres et sucrées, avec auprès de soi, la voix chaude et le verbe chaloupé de Zoé Valdès, qui nous murmure à l'oreille l'histoire des lieux.

"Ce livre est une sorte d'essai sur La Havane, avec sa part de rêve et de fiction. (...) Comme une mère, comme une soeur, [La Havane] me renvoyait ma propre image, démultipliée, mon image éclatée comme une larme en mille morceaux."

L'auteure est née avec la révolution cubaine : en cette année 1959, les révolutionnaires ont été accueillis par les vivats d'une foule enthousiaste et pleine d'espoir. L'embargo des États-Unis, le ralliement à l'union soviétique et les années noires de la répression qui suivirent eurent vite raison de cette euphorie. Mais là n'est pas le propos de ce livre, mais la cause de l'expatriation qui nous vaut cette vibrante et touchante déclaration d'amour de Zoé Valdès* à sa ville de naissance et de coeur.

"L'exil est un châtiment ; ce n'est pas un cadeau. L'expérience peut être enrichissante, c'est vrai, mais je verrai toujours l'exil comme une punition."

Zoé Valdès nous conte ses souvenirs, avec beaucoup de poésie, d'émotions et d'admiration pour cette Havane qui a vécu et continue à vivre sans elle, en intercalant à son récit, de courtes descriptions qui semblent tout droit sorties d'un guide touristique, comme un ancrage nécessaire, une bouée à laquelle se raccrocher. Un peu comme une enfant qui voudrait se rassurer, en prenant l'autre à témoin : 'Regarde, je n'ai pas rêvé ! C'est bien vrai ce que je dis, puisque c'est écrit là !'

"Le plus fort, c'est quand tu éprouves cette sensation de porter en toi les rues où tu es né, celles où tu as grandi, alors même que tu marches dans d'autres rues, qui te sont étrangères."

Revisiter par l'écriture cette Havane tant aimée, c'est donner corps à ce qui vit en elle de la ville et de ces habitants : le Caballero de Paris, qui offre ses poèmes comme d'autres des fleurs, Farolito sanglotant sur la disparition de Paquita Terremoto, la mère qui rentre au lever du jour, portant "sur ses épaules le poids de la ville entière", Sibilla qui "reviendra, funambule en éveil, en équilibre sur le fil que lui tend le sommeil", la vie à Cojimar qui laisse "le corps tout salé, tout défait", la démolition de la maison rue Muralla, le Christ de la Havane, banni, ces couples qui dansent, étincelants, tout habillés de blanc et cette musique des bars et des rues...

"Je remercie une fois de plus ceux qui aiment La Havane, qui la comprennent du plus profond de leur être, qui la caressent sans la brutaliser, sans l'humilier ; car c'est aussi grâce à eux que La Havane reste debout, capable de survivre à n'importe quelle époque, à n'importe quel désordre. Je remercie les Havanais de naissance, qui se reconnaîtront au coin de chacune de ces pages. Alors, ils déambuleront de chapitre en chapitre, je les tiendrais par la main, avec leurs fantômes, qui sont aussi les miens."

Et moi de remercier Bookycooky, sans laquelle je n'aurai pu découvrir ni ce livre ni cette auteure...

*Zoé Valdès est interdite de séjour à Cuba, depuis 1995 date de la parution de Néant Quotidien.
Lien : http://page39.eklablog.com/l..
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