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Critique de Soukiang


Comment concilier plaisir de la lecture avec réflexion pertinente sur la vie qui peuvent nous interpeller, nous mener par tous les chemins possibles ?
Que cela soit sous le format d'un roman prenant le temps du développement ou par le biais des fulgurances comme seules peuvent le permettre les Nouvelles, un seul objectif, lire jusqu'au bout et vous faire peut-être bousculer votre conscience, sur le mode de l'observation ou dans l'ironie mordante, tout est propice à ouvrir de nouvelles voies de questionnements sociétales en n'oubliant pas les fondamentaux de rapprocher nos sensibilités communes et propres à chacun.

Dans Blouse blanche et 5 nouvelles d'anticipation de Jb Antoon van Dyck aux NDB Editions, dont je remercie Nelly Daubry Bouyer pour l'envoi du SP, le plaisir a été proportionnel au temps pris pour savourer chacune d'elle, comme il se doit, à son propre rythme mais aux sons percutants et surprenants de l'écriture ciselée, des contre-basses ne manquant pas de vous faire oublier votre respiration, de l'air pernicieux sifflant dans les interstices fuyants, dans ces virées nocturnes le danger est partout, la menace d'un monde en perdition se mire en permanence de ses effets délétères, c'est le risque à vouloir tout comprendre les enjeux, de la réalité à un futur proche, il est parfois des choses qui nous échappent, le commun des mortels n'en a pas fini de grincer des dents et demain, c'est aujourd'hui !

Il est toujours un exercice délicat de chroniquer un recueil de nouvelles de par la dimension du texte et par la chute inévitable et incontournable pour qualifier une histoire de Nouvelle, sans tomber dans le piège de spoiler.

S'il est encore un genre de littérature relativement assez méconnu pour trouver un large public en France (au contraire des pays Anglo-Saxons), elle présente un avantage indéniable à être lue rapidement quand le temps vient à manquer, que des variables existentielles viennent perturber votre lecture, tous les grands auteurs d'antan et d'aujourd'hui ont commencé par en écrire ou s'en donnent à coeur d'en publier régulièrement entre deux romans, de ces courts textes peuvent regorger des petites pépites, des trouvailles originales ou singulières, de révéler un style, de marquer une voix différente pour toucher des cordes de toutes les résonances, appuyer sur le bouton d'alarme pour titiller des consciences, remettre en question des certitudes, pousser dans ses derniers retranchements le lecteur comme de le manipuler afin de lui faire sentir le souffle vertigineux de cette brutale course ... descendante !

Encore plus que le roman, la Nouvelle se doit de garder tous ses mystères dans la narration, dans ses personnages réduits à une expression libre voire deux dans le meilleur des cas, dans cette construction qui épargne des détails superflus mais n'en reste pas moins suffisamment incisive pour trouver le temps de mûrir en crescendo, l'idée d'associer des thématiques sensibles comme la surpopulation, les limites de la science au regard de l'éthique morale, le prolongement de la vie, la folie humaine s'ancre ici dans le filtre de l'individu comme du collectif, le poids des décisions, la nostalgie d'un monde oublié, le ressenti se mesure à hauteur des pages parcourues, l'impuissance à endiguer la poursuite effréné d'une planète au bord de l'implosion, jusqu'où la Terre pourra-t-elle encore résister à trop vouloir dévier de ses préoccupations majeures ? A traquer les sujets qui sortent de l'ordinaire, de mieux brider la chaîne humaine comme d'en contrôler la destinée de millions de personnes ?

L'auteur n'hésite pas à employer le ton corrosif pour irriter la peau et semer le doute, l'humour est un excellent remède contre la morosité, faire du sens un contre-sens et tourner en bourrique un microcosme à l'échelle d'un pays voire de toutes les populations, les traditions sont supplantées par des caprices et des désirs allant à l'encontre de l'intérêt commun, certaines de ces nouvelles crissent sous les pneus de cette violence à l'oeuvre, qu'elle soit sourde ou viscérale, la vie se conjugue ici à toutes les nuances du gris, du blanc au noir et vice-versa, c'est toute la richesse d'êtres humains qui se manifeste au travers des désirs secrets et étouffés par des voix de l'ombre, des personnages anonymes rêvant d'un futur meilleur ou de préserver encore l'once d'humanité qui leur reste, tout peut devenir opaque ou lumineux, dans l'attente d'une intervention divine, est-ce le fruit du hasard ou la concrétisation d'un plan mûrement planifié à l'avance, seul l'avenir le dira ...

Tout à tour imprégné d'un écran de fumée ou d'un filtre éclairant, il en résulte pourtant quelques subtiles solutions non dénuées d'intérêts profonds, l'ensemble démontre un fil rouge revisitant les principales craintes et incertitudes d'un monde en pleine turbulence, de la schizophrénie à la paranoïa, de la vie à la mort, du blanc au noir et inversement, du jour au lendemain, il est des nuits qu'il aurait mieux valu ne jamais avoir traversé !

Un recueil de nouvelles glaçantes mixant constatation implacable et humour noir, la satire d'une société en complète déconfiture n'est jamais loin, édifiant le mot est lâché, d'un ton jamais moralisateur mais dans la mouvance d'une réalité qui est peut-être déjà en train de se transformer radicalement, le compte à rebours a commencé, tic tac, tic ...

Entre deux romans, lire des nouvelles peut s'avérer salvateur et jubilatoire, dans le cas présent, l'auteur Jean-Baptiste van Dyck - Ecriture apporte une touche personnelle pour porter un regard percutant sur le monde d'aujourd'hui mais surtout celui qui risque d'arriver plus vite le temps de se retourner !
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