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Critique de colimasson


Après m'être attaquée à la série Fritz Haber en toute logique, en commençant par le troisième volume, j'ai jugé utile de revenir sur la première parution de la série afin de vérifier que le très talentueux David Vandermeulen avait déjà inauguré son projet sur des bases solidement amarrées. Je confirme, il est utile et agréable de commencer la lecture de Fritz Haber par le premier volume…


Ces 150 premières pages nous permettent de découvrir l'enfance du personnage, jalonnée des difficultés que peut rencontrer n'importe quel « estampillé juif » au cours de ses études. Malgré son talent pour les matières scientifiques, son origine l'empêche d'être reconnu à sa juste valeur et d'accéder aux mérites que son intelligence justifie. de là s'amplifiera son ambition et son envie de réussir au-delà des limites qu'on lui impose. On comprend également quels motifs sont à l'origine des trahisons qu'il commettra dans le futur à l'égard de son peuple et de ses origines. En effet, Fritz Haber est un homme tiraillé de toutes parts entre son histoire individuelle, entre l'Histoire et entre ses ambitions. Dans ce cas, il lui est très souvent difficile de faire la part des choses et ses actes, qui nous semblent d'abord contradictoires, deviennent clairement compréhensibles lorsqu'on connaît les motivations qui en sont à l'origine. L'évolution de Fritz Haber, telle qu'elle nous sera présentée dans les volumes suivants, devient plus limpide.


La cohérence s'inscrit également au niveau graphique puisque l'on retrouve les couleurs façon papier-vieilli et la typographie issue de la tradition du cinéma muet. de même, l'intérêt documentaire reste indéniable et nous permet, en toute connaissance de cause, de repérer les signes annonciateurs de la montée du nazisme. On en apprendra également beaucoup sur le sionisme et l'état du progrès scientifique au début du 20e siècle.


En exergue, on retrouve également des extraits éloquents : il s'agit souvent de textes importants, signés par de personnages qui ont eu une influence extrême au coeur du contexte politique et intellectuel du début du 20e siècle en Allemagne (Gobineau, Henrich Heine, Thomas Carlyle…).


« Cet aveu que l'avenir appartient aux communistes, je le fais d'un ton d'appréhension et d'angoisse extrêmes. Ce n'est qu'avec horreur et effroi que je pense à l'époque où ces sombres iconoclastes parviendront à la domination ; de leurs mains calleuses, ils briseront sans merci toutes les statues de marbre de la beauté, si chères à mon coeur ; il fracasseront toutes ces babioles et fanfreluches fantastiques de l'art qu'aimait tant le poète ; ils détruiront mes bois de lauriers et y planteront des pommes de terre ; les lis, qui ne filaient ni ne travaillaient et qui pourtant étaient vêtus aussi magnifiquement que le roi Salomon dans toute sa splendeur, ils seront arrachés alors du sol de la société, à moins qu'ils ne veuillent prendre en main le fuseau ; les roses, ces oisives fiancées des rossignols, auront le même sort ; les rossignols, ces chanteurs inutiles, seront chassés ; et, hélas, mon Livre des Chants servira à l'épicier pour en faire des cornets où il versera du café ou du tabac à priser pour les vieilles femmes de l'avenir. Hélas, je prévois tout cela, et je suis saisi d'une indicible tristesse en pensant à la ruine dont le prolétariat vainqueur menace mes vers, qui périront avec tout l'ancien monde romantique. »
Henrich Heine


Lorsque l'enrichissement et le plaisir se retrouvent pour nous instruire sans en avoir l'air, ne reste plus qu'à découvrir la série dans l'intégralité de ses volumes…
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