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Critique de DavidG75



« Entre gris et graffitis où s'enferme le quotidien
Et des murs tellement petits qu'on entend tout des voisins
Avec pour seul vis-à-vis des montagnes de parpaings
Où déambule l'ennui et se traînent des destins
Le samedi après-midi, prendre des souterrains
Aller voir où ça vit de l'autre côté, ligne un
Châtelet… »


Cinq heures du mat'… Arrêter ce réveil qui cogne dans sa tête, se lever, affronter une nouvelle journée…

Mathilde sait qu'aujourd'hui encore, il faudra se faire violence. Pour Simon, son aîné. Pour Théo et Maxime, les jumeaux. Pour l'amour de Pierre. Pour son absence. Parce qu'il lui manque tant.
Ne pas oublier les collations des petits… Penser à réserver les vacances…

Déambuler dans les matins brumeux de la ville en dédale. Descendre les marches. Vingt-sept. Composter son billet. Attendre la rame au milieu de tous ces fantômes. Bondée. La suivante sera là dans dix minutes…

Franchir la porte du bureau. Affronter le regard des autres. Au mieux. Leur indifférence. Au pire.
Comment a-t-elle pu en arriver là ? Se vider de sa substance. Devenir une batterie morte. Obsolescence programmée, joie de vivre déprogrammée. Recasée. Déclassifiée. Archivée au bout du couloir…

Elle rêve parfois d'un homme à qui elle demanderait : est-ce que tu peux m'aimer ?


« Station balnéaire
Mais où y a pas la mer
Voir un peu de bleu, Châtelet
Échouer sa galère
Marquer son passage
Suivre les tags quand y a plus de repères
Châtelet… »


Cinq heure du mat'… Retrouver son lit, s'effondrer, ne plus penser à rien…

Thibault termine sa garde. Il sait que demain sera comme aujourd'hui. Il continuera à panser les plaies des autres et en oubliera les siennes. Mais comment cautériser une plaie d'amour ?

Si seulement Lila l'avait aimé… Pas qu'à l'horizontal, pas que la nuit venue… Parce que l'amour, « ce n'est pas une question de gymnastique. C'est une question de peau, d'odeur, de matière »…

Encore une heure à tenir. Quelle adresse déjà ? Un mauvais rhume, une crise d'angoisse, une petite vieille seule ? La solitude, l'abandon… Voilà le mal dont souffrent les gens…

Il rêve parfois à une femme qui pourrait l'aimer…

Mais les gens désespérés peuvent-ils se rencontrer dans la vraie vie, quelque part au point d'équilibre entre la lumière et le néant de leurs vies ?


« Châtelet les Halles
Fin du voyage… »


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Un livre sombre, haletant, vibrant, étouffant… Mais un livre brillant !

Avec Les heures souterraines, Delphine de Vigan nous entraîne dans les bas-fonds du comportement humain, dans la tristesse des habitudes qui rongent, qui épuisent. Elle nous abandonne au milieu d'une foule fantôme. Cette foule docile des grandes villes qui suit jour après jour la voie rectiligne d'une rame de métro.

Avec une écriture prenante, fluide et tranchante, elle aborde les thèmes de la solitude et du harcèlement moral. Elle peint le quotidien de deux âmes fragiles, perdues dans un monde en mouvement perpétuel, dont le souffle de vie ne tient qu'à un fil mais qui ne veulent pas s'éteindre.

Il faut pourtant garder espoir car derrière ces heures souterraines, il y a toujours une station quelque part où le soleil brille.

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