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Critique de fbalestas


Prenez deux personnages principaux.
Prenez un assistant parlementaire, prénommez-le Antoine et décrivez sa vie (à vous dégoûter pour toujours de postuler sur ce genre de fonction).
Prenez une hackeuse, ne lui donnez pas de prénom, seulement la première lettre d'un prénom – l'– (elle ?).
Faites- les se rencontrer. Mais pas trop vite (attendez la page 122 pour qu'ils se croisent à une soirée) et ensuite la page 230 pour qu'ils se voient à nouveau dans un bar.
Essayez de tisser un roman avec tout ça.

Chacun a un « dedans » : l'vit essentiellement au travers d'Internet, et fuit le monde du « dehors ». Antoine vit dans le monde du politique, tout aussi enfermant.
Qu'est-ce qui les relie ? Un âge similaire – ce sont des trentenaires – et sans doute un milieu parisien, même si ni l'un ni l'autre n'en sont issus. Mais aussi une forme de désillusion (plus d'idéaux dans lesquels s'engager aujourd'hui) et surtout une profonde lassitude, même si l'a rencontré Elias, son double hacker. Mais celui-ci s'est fait arrêter et il lui manque profondément. Une forme de dépression les unit donc tous les deux.
Quant à Antoine, il se rêve écrivain – bien sûr, parce que comme de très nombreux Français (on les estime à 10% de la population, ce qui fait tout de même près de 6 Millions de Français) il voit en rêve son nom en tête de gondole de toutes les bonnes librairies parisiennes. Mais il peine à écrire.
Tout le problème provient du choix de ces deux personnages : si, comme moi, vous n'êtes pas très au fait du monde du dedans d'un hacker, l'auteur va bien devoir vous expliquer comment ça fonctionne. D'où un long développement plutôt didactique pour qu'on arrive à suivre les aventures de L.
Un peu plus facile pour le monde politique, l'auteur va tout de même passer un bon bout de temps à nous expliquer ce que fait un Assistant parlementaire, profession dont on ne saurait presque rien si un candidat à la Présidentielle n'avait pas fait irruption sur la scène médiatique au sujet de sa prétendue assistante parlementaire qui n'était autre que son épouse.

Sur le plan sociologique, tout y est : on se replonge aussi dans une période très proche du point de vue du calendrier (tiens, Nuit Debout! ah oui on avait un peu oublié) ou la révolte des Gilets jaunes, mais lointaine depuis de nos préoccupations quotidiennes. La question du déterminisme social est aussi très bien traitée (Antoine n'en sortira pas si facilement, à l'image de « Leurs enfants après eux », Goncourt 2019).
C'est documenté, il n'y a rien à dire de ce côté.

Mais alors ? D'où vient cette sensation d'avoir devant soi un ouvrage studieux, laborieux, mais qui ne fonctionne pas d'un point de vue du tempo ? Il nous est dit que ce roman avait pour thème l'engagement : « Comment continuer le combat quand l'ennemi semble trop grand pour être défait » ?
Peut-on encore agir dans ce monde post 68 ? le mot « engagement » a-t-il encore un sens ? Quelque chose est-il possible pour cette génération « désenchantée » ?

Heureusement il y a les personnages secondaires, tels Selma qui milite au sein d'une association féministe ou Xavier qui essaie de faire revivre une ferme au milieu de nulle part, en Bretagne.
J'avais beaucoup apprécié Alice Zeniter, dès « Sombre dimanche » que j'avais chroniqué à l'époque. J'avais été très enthousiaste à la lecture de « L'art de perdre » que j'avais aussi chroniquée.

Avec « Comme un empire dans un empire », le style est toujours là, le sujet est bon, le regard porté sur les trentenaires est juste, le propos intelligent mais … le récit est à la peine et la question du rythme fait perdre son intérêt à la lecture. Je suis déçue.

Dommage, parce que les ingrédients sont les bons, mais peut-être la dépression des deux personnages a-t-elle déteint sur le récit, rejoignant une morosité ambiante – peut-être un ingrédient n'est-il pas suffisamment présent : un peu d'humour nous aurait fait du bien.

Lien : http://versionlibreorg.blogs..
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