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Critique de Andromeda06


"La débâcle" est le dix-neuvième tome des Rougon-Macquart, soit l'avant-dernier alors que c'est lui qui pourtant clôt la série, faisant office de conclusion historique en relatant la chute de l'Empire. Zola nous invite ici au coeur même de la guerre, celle de 1870-1871, dans laquelle on assiste à la défaite des français face aux prussiens.

Nous retrouvons ici Jean Macquart, que nous avions suivi dans "La terre", quinzième tome de la série. Ce dernier, après le drame qu'il a vécu, s'est réengagé dans l'armée. Caporal dans le 106ème régiment, il se lie petit à petit d'amitié avec Maurice, chacun sauvant tour à tour la vie de l'autre. Ayant pourtant des idéologies différentes, nous assistons à une amitié de plus en profonde, dans laquelle chacun vit le calvaire de l'autre. La guerre, la mort, le sang, la faim et les intempéries les rapprochent, au point de devenir comme des frères, se partageant leur quotidien, les unissant pour la vie. Jean fera même la connaissance d'Henriette, la soeur jumelle de Maurice qui vient de perdre son mari, exécuté par les prussiens, et avec qui il se trouve des affinités...

Le roman se découpe en trois parties : avant, pendant et après la bataille de Sedan. Nous sommes d'abord projetés sur les routes de l'Est de la France, un peu au hasard en fonction des ordres contradictoires de nos supérieurs, quand ordre il y a. Nous marchons, beaucoup, sans vraiment savoir où nous allons, les destinations pouvant changer continuellement, jusqu'à plusieurs fois d'un jour à un autre. Nous marchons donc, vers l'incertitude, vers l'incompréhension, vers la confusion, vers le désarroi. L'attente, les retraites forcées, la lenteur de la marche, le mépris et l'incompétence des gradés nous mettent en colère (nous ne sommes pas des toupies !), nous démoralisent. Et quand nous sommes enfin "invités" à participer à la bataille, nous sommes éreintés et démoralisés, nous avons très faim et ne sommes pas en mesure de donner notre maximum...

Puis nous sommes au coeur même de la bataille, nous y assistons de plusieurs points de vue : celui des soldats, sans ou peu gradés, par le biais de Jean et Maurice ; celui de la cavalerie (Prosper) et de l'artillerie (Honoré) ; celui des soigneurs et des ambulances (Bouroche) ; celui des civils (Henriette, Delaherche).

Et enfin, après la terrible défaite qui a coûté énormément de vies, nous sommes d'abord faits prisonniers par l'armée allemande, avant de lui échapper. Débute alors la "semaine sanglante", que là encore nous assistons de plusieurs points de vue : celui des "communards" et celui de l'armée de Versailles.

Grâce à la précision de Zola, à sa minutie à vouloir tout nous raconter dans les moindres détails et de la manière la plus réaliste possible, j'ai pu moi-même me rendre compte de toute l'horreur de la guerre, tellement je m'y suis cru. Zola a dépeint chaque évènement de manière incroyable, n'a strictement rien omis. Il nous parle des ressentis de ses personnages aussi bien qu'il le fait des épisodes tragiques, sanglants, sordides lors des combats. S'il nous faut parfois avoir l'estomac solide lors des passages les plus sanglants, il ne nous faut pas oublier non plus savoir ouvrir notre coeur pour les passages plus doucereux.

Zola s'est ici surpassé. Il a su raconter la guerre et toutes ses horreurs d'une manière telle qu'il m'a totalement envoûtée. J'ai eu quelque peu du mal avec la première partie, que j'ai trouvée parfois longue et répétitive. J'ai été en revanche complètement absorbée dans les deux dernières. Tout est parfaitement décrit. Chaque évènement apporte son lot d'horreurs (ou au contraire de douceurs) mais il le fait de manière telle qu'on ne désire qu'une chose : continuer à lire quand même, afin de savoir ce qu'on nous réserve par la suite.

J'ai fini par m'attacher à chacun des protagonistes, ce qui est plutôt rare en ce qui me concerne dans les romans de Zola. On se doute que le sort de chacun ne sera pas tout rose : n'oublions pas que c'est la guerre et que les français se prennent une sacrée déculottée (n'oublions pas non plus que c'est du Zola !). Et pourtant, on les apprécie de plus en plus, on les aime même, au point que je me suis mise à espérer la clémence de l'auteur pour certains d'entre eux.

Comme à mon habitude, je n'ai pas lu la quatrième de couverture avant lecture, toujours dans mon objectif d'en connaître le moins possible et garder un effet de surprise dans le déroulé des événements. Ce livre n'étant quasiment jamais passé sur mon fil d'actualité, je ne savais en fait pas grand-chose de l'intrigue, ou du moins celle propre aux personnages. J'ai donc savouré ma lecture comme il se doit. Et je me félicite d'avoir agi ainsi, puisque l'édition que je possède dévoile tout du dénouement dans le résumé de sa quatrième...

"La débâcle" est l'un des Rougon-Macquart les plus poignants, les plus marquants. Ultra-réaliste, il ne nous laisse pas indemne au sortir de notre lecture. Et la plume de Zola, toujours aussi méticuleuse et envoûtante, y est pour beaucoup.
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