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Critique de Anmoon


« Par le fil je t'ai cousue !» Ainsi débute l'incantation faite par pour protéger la narratrice lors de son départ vers la ville, pour y poursuivre des études secondaires. Dans ce roman aux accents de mémoire, l'auteure nous invite à la rencontre de sa famille, de son enfance, de son village, à l'aube du règne de Bourguiba, juste après l'indépendance de la Tunisie et le départ
des Français.

Avec ce président qui arrive s'installe une certaine modernité au village (télévision, automobile, scolarisation des filles), en même temps qu'une paupérisation due à la politique socialiste confisquant les terres agricoles qui faisaient la richesse, ou à tout le moins permettaient à chacun d'être nourri à sa faim. En même temps, le poids de la tradition, la séparation radicale entre hommes et femmes, sont abordés de même manière, et confrontés au présent également lors des allers-retours que l'auteure opère entre son enfance et l'âge adulte, dans sa vie désormais française. Dans ce récit, nous assistons vraiment à une révolution, qui fait voler en éclat des traditions millénaires, et qui remet en question le fonctionnement du village.

Quelle magnifique conteuse est Fawzia Zouari ! Cette petite fille avide d'apprendre, qui vit l'école et l'enseignement comme un salut, et qui n'est qu'âme et pas corps, pour échapper aux regards des hommes et aux remontrances de ses frères. Cette petite soeur, dont les aînées ont été retenues à la maison par leur mère, très attachée à la tradition et à la place de la femme, ou plutôt non-place de la femme dans la société (plus que leur père, qui finalement est celui par
lequel la narratrice, contrairement à ses soeurs plus âgées, peut continuer son parcours scolaireet prendre le chemin qui l'émancipera).

Femme cachée, femme à la maison, femme par laquelle ne doit jamais arriver le scandale, femme qui observe en cachette, femme citadine, femme villageoise, femme qui vit parmi les femmes, femme qui découvre le monde par l'entremise d'un écran carré, femme qui, dans la génération suivante, peut s'instruire et envisager de sortir de ce carcan bien contenu…

L'auteure a fait partie de cette première génération à pouvoir bénéficier de l'enseignement obligatoire, et son parcours d'études lui a fait découvrir d'autres horizons.

J'ai énormément aimé suivre cette petite fille dans son cheminement, j'ai apprécié son regard curieux sur les choses, les gens. J'ai écouté ce que l'adulte qu'elle était devenue avait à raconter, à partager, ce qu'elle gardait de son enfance, ce qui relevait de ses racines, ce qu'elle avait acquis en termes d'ouvertures en s'instruisant. L'écriture de Fawzia Zouari est belle et émouvante, et je ne peux que vous conseiller de la découvrir.
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