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Critique de Zoeflette


La pauvreté n'est pas un simple état ; elle anime, accompagne à jamais celui qui l'a suffisamment intériorisée, et ce jusque dans la jouissance et le luxe.
Voilà ce que démontre Stefan Zweig dans ce court roman, où le lecteur assiste à l'éveil de la conscience de Christine, jeune fonctionnaire miséreuse qui se retrouve projetée dans un monde de luxe et de beauté. Ivre d'un bonheur inespéré, ivre de se voir métamorphosée en élégante demoiselle, elle ne se rend d'abord pas compte de la médiocrité et des intentions parfois malhonnêtes de son brillant entourage. Au cours de ces courtes vacances à la montagne (l'élévation géographique faisant ici écho à son élévation sociale), elle alimente le réservoir de ses frustrations futures. Car sa pauvreté est une maladie incurable et, une fois ébruité dans l'hôtel le secret de ses modestes origines, elle sera contrainte de quitter "son moi ailé pour réintégrer une larve amorphe, aveugle, rampante". Christiane van Boolen devra redevenir la quelconque Christine Hoflehner, auxiliaire des postes à Klein-Reifling. Une fois de retour dans son morne village autrichien, Christine se découvrira incapable de poursuivre son ancienne existence.
A bien des égards, cette oeuvre peut entrer en résonance avec un autre roman inachevé, qui lui aussi dévoile ce mystère qu'est l'impossibilité de cacher sa modeste ascendance. Cette oeuvre porte un nom ambigu : "Le Paysan parvenu". Comme dans "Ivresse de la métamorphose", le protagoniste (Jacob) n'a d'abord aucun mal à se fondre dans la haute société. D'une part, il adopte les codes en vigueur ; comme Christine, il sait qu'un simple nom peut ouvrir ou fermer des portes. D'autre part, il séduit par sa spontanéité et son enthousiasme, alors que ceux qui sont nés dans l'opulence et le plaisir y sont devenus presque insensibles. Mais ce visage à deux facettes ne suffit pas à sauver de l'opprobre ces deux héros continuellement rattrapés par leur passé.
C'est le double de Christine, sa propre tante, qui la chassera poliment du paradis où elle l'avait invitée. Sentant ressurgir en elle la crainte d'être démasquée (car comme sa nièce, elle doit son élévation à un heureux hasard), la respectable Claire van Boolen, autrefois Melle Clara, congédiera sa nièce sans savoir quels bouleversements elle aura provoqués chez elle.
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