L'amant est venu dans le lit,
La boucle s'est déliée d'elle-même à l'instant;
La robe, retenue par un cordon défait,
N'a plus que recouvert légèrement les reins.
Voilà tout, mon amie, ce que je me rappelle
Du moment où mon corps était uni au sien;
Mais qui il était, qui j'étais,
Ce que fut le plaisir,
Il ne m'en reste pas le moindre souvenir.
(la jeune femme, à une amie)
Il s’est adressé à moi : « Je dois te parler. »
En un lieu écarté, auprès de lui je me suis assise,
Attentive en raison de mon cœur innocent.
Il m’a confié alors quelque chose à l’oreille,
Il a baisé ma bouche, a saisi mes cheveux,
Et a bu, mon amie, le nectar de ma lèvre
« Les propos que le couple a tenus dans la nuit,
Le perroquet familier les a écoutés.
Au matin, comme il en dit trop devant les parents ,
La jeune femme lui met au creux du bec
Un rubis de son pendant d’oreille:
Accablée de pudeur, d’un faux grain de grenade
Elle fait un bâillon ! »
Quand j'entends le nom de mon bien-aimé,
Je suis tout entière en proie aux frissons;
Quand je vois la lune de son visage,
Mon corps se conduit comme pierre de lune;
Quand il vient tout près pour prendre mon cou,
Le Seigneur de ma vie,
Toute idée de colère se trouve dissipée
De mon coeur dur comme diamant.
On mord la fleur de sa lèvre,
Elle agite ses doigts tremblants :
"Non, non, laisse-moi, cruel!"
Dans sa colère,
Elle fait danser la liane de ses sourcils;
Elle gémit, les yeux mi-clos :
Ceux qui, tout frissonnants,
Etreignent une belle insoumise
Obtiennent l'ambroisie;
Bien sots furent les dieux,
Qui s'épuisèrent à baratter l'océan!
La nuit, effrayé du tonnerre des nuages
Alanguis de leur charge d'eau,
Tout en larmes un voyageur
Chante la douleur de la séparation,
Avec tant de regret
Que l'on coupe court aux conversations
Sur le grand départ emportant la vie :
A la dispute même
On s'empresse d'offrir de l'eau pour les trépassés !
Sa colère apaisée, elle tint dans ses mains
La lune de son visage
J’avais tout épuisé,
Mon seul refuge était de tomber à ses pieds
Contenues jusqu’alors au-dedans des paupieres,
En foule se pressant à la frange des cils,
D’un coup ses larmes dévalèrent
La pente de ses seins, proclamant mon pardon.
Les propos que le couple a tenus dans la nuit,
Le perroquet familier les a écoutés.
Au matin, comme il en dit trop devant les parents,
La jeune femme lui met au creux du bec
Un rubis de son pendant d'oreille :
Accablée de pudeur, d'un faux grain de grenade
Elle fait un baillon !
Quand l'époux touche sa robe,
Elle courbe la tête avec modestie;
Quand il désire une étreinte fougueuse,
Elle s'écarte doucement;
Incapable de parler,
Elle adresse ses regards aux amies souriantes :
La jeune mariée est transie de pudeur
A la première approche.
Autrefois, nous ne formions qu'un corps;
Et puis tu fus l'amant,
Et moi, une amante désespérée;
Maintenant, tu es l'époux,
Je suis l'épouse. Quoi d'autre?
De ma vie misérable, dure comme un diamant,
Voilà le fruit!