- voila bien les filles, tu veux enlever la panthère, tu veux la cacher dans une chambre du château 🏰.
- pardon, c'est toi qui as eu l, idée.
- admettons, le château et inoccupé, le jardinier, sourd comme un pot , et sa femme ne monte jamais dans les étages.
elle a.... heu .... des valises... aux jambes.
- tu veux dire des varices, bêta.
J’ai des remords. Dans ces premiers souvenirs, je ne me suis pas montrée objective. Il me semble qu’on sent déjà de l’amertume dans certaines allusions. Je dois retrouver l’état d’âme de la grande fille qui disait à son père : « Je l’aimerai, je la protégerai toujours. » J’ai pu donner l’impression que Natacha n’était pas toujours sincère, préoccupée avant tout de mener le monde entier selon ses vues. Ce n’est pas vrai. A ce moment-là, elle était simplement généreuse, enthousiaste. On pourrait la croire fausse, tortueuse, toujours prête à se mettre en avant. Ce n’est pas vrai. Natacha était droite. Elle m’aimait et me l’avait prouvé de mille façons. Et quand elle a connu Janos, elle a certainement été totalement désintéressée, elle a certainement été éblouie par son talent, par les possibilités de cet homme. Elle a même sans doute éprouvé pour lui un sentiment quasi maternel.
Les premiers temps…
Il faut donc que je lutte contre moi-même, que je retrouve la fraîcheur de mon cœur.
Comment arriver à persuader ces jeunes pleins d’ardeur, de violence, que rien ne dure, que tout s’apaise à la fin, que l’homme a en lui un goût si profond de la vie qu’il s’élève généralement au-dessus de sa douleur.
Les femmes se trompent parfois en espérant maintenir les hommes sur un pied de camaraderie. C’est de la candeur. Un homme amoureux reste amoureux s’il continue à trop voir l’objet de son amour.
C’est terrible de mourir si jeune, mais tu en parles à peine ! « Qu’est-ce que je vais faire sans lui… Il était toute ma vie, etc. » Ne te fâche pas. Je sais que ta réaction est humaine, et nous sommes tous comme cela. Pourtant, il faut que tu reprennes goût à une existence équilibrée : je suis convaincu que c’est le meilleur moyen d’y arriver. Retrempe-toi dans tes souvenirs, donne à ton mari, à ton amour, sa véritable dimension et ainsi tu arriveras à…
Les grands de ce monde ont peine à trouver le simple bonheur. Comment aurait-il été heureux d’ailleurs, auprès de ce vieux grand-père, un empereur, écrasé de responsabilités, qui l’aimait, mais craignait l’influence de l’extraordinaire père de l’Aiglon ? Et puis, quel rôle a joué Marie-Louise ? Je ne me sens pas le droit de la juger, mais elle est bien difficile à comprendre; non, les grands de ce monde sont bien loin du bonheur.
J’ai horreur de l’eau, à présent. Celle-ci est sombre, trouble, polluée, belle seulement de loin, quand elle roule et étincelle. Une eau qui charrie toute la crasse de l’humanité et qui fuit désespérément, éternellement, vers la pureté de l’Océan. S’il est encore pur ! Je ne l’imagine limpide que là-bas, au-dessus de Janos. C’est idiot, d’ailleurs, puisque je sais qu’il n’y est plus, mon cher amour !
Je ferai de vous un homme présentable. Mon pauvre ami, vous avez tout à apprendre sous ce rapport. Vous êtes un artiste incomparable, un pianiste-né. Sous cet angle, rien à craindre. Mais il vous manque le reste. Ce serait un crime de ne pas exploiter un talent comme le vôtre, d’étouffer une personnalité aussi marquée, pour une mesquine question d’apparence superficielle.
Le temps passait. Je garde un souvenir pesant, pénible de cette époque. Je vivais dans l’angoisse du départ et roulais toutes sortes de visions pessimistes dans ma pauvre tête, dont la plus folle était une spectaculaire mort en couches pendant que mon mari, inconscient du drame, jouerait devant un auditoire transporté.
La créature qui me souriait — hypocritement, je l’eusse bien juré ! — scintillante de bijoux, était belle, de cette beauté qui n’a plus rien à voir avec la jeunesse, mais bien avec l’architecture de beaux traits, et le maquillage. Je la détestai cordialement.