C’est la grille de lecture que tout à la fois elle produit et applique au champ du savoir, et à la limite de tout savoir, et par lequel elle le modèle ou le remodèle, voire le construit. Cette grille de lecture prend pour paramètre la notion de gender, de genre telle que les féministes américaines l’ont élaborée et telle que la développe (ici même) Joan Scott, à savoir le paramètre de ce que nous nommons en français la différence des sexes, mais une différence qui inclut la dissymétrie des différents et leur articulation en termes de pouvoirs
Une théorie qui repose sur la variable unique de la différence physique est problématique pour les historien(ne)s : elle présuppose un sens permanent ou inhérent au corps humain – en dehors d’une construction sociale ou culturelle – et donc la non historicité du genre lui-même. D’un certain point de vue, l’histoire devient un épiphénomène qui offre des variations interminables sur le thème immuable d’une inégalité de genre fixe
interroger l’écriture de l’Histoire, non pas celle des femmes mais tout simplement l’Histoire, et de réfléchir sur ce que les historiens appellent événement, afin de comprendre pourquoi la parole, les écrits, les actes des femmes ne sont pas considérés comme tels
Comment parler d’une vie de femme, étant bien entendu que nous ne voulons pas suggérer par là une qualité féminine particulière de cette vie, mais qu’elle fut celle d’un individu de sexe féminin, cette appartenance ayant une importance décisive à nos yeux ?
le genre est un élément constitutif de rapports sociaux fondés sur des différences perçues entre les sexes, et le genre est une façon première de signifier des rapports de pouvoir
Ceux qui se proposent de codifier les sens des mots luttent pour une cause perdue car les mots, comme les idées et les choses qu’ils sont faits pour signifier, ont une histoire
restituer à la réflexion sur les femmes une historicité, et arracher celles-ci à leur statut d’objets, pour voir en elles de possibles sujets de discours ou d’histoire
Un fait sans lien avec le passé, sans groupe pour l’interpréter, n’existe pas pour l’histoire politique car la différence, le changement n’apparaissent pas
l’histoire des femmes, pensons-nous, ne peut s’écrire indépendamment de celle des rapports de pouvoir, ni de celle des hommes