A.K. Alexander

La petite fille aux longues nattes brunes et aux yeux bleus scrutait les visages des parents dans le public. Holly leva le bras et agita la main. Elle s'était glissée dans les rangs des retardataires - principalement des papas -, debout au fond de l'auditorium.
Holly vit un sourire se former sur le visage de Chloe, tandis que celle-ci, d'un battement de son index dressé à hauteur de poitrine, lui signifiait qu'elle l'avait vue. Holly répondit du même geste : leur petit salut personnel.
La petite était vraiment super mignonne. Pour une fois, Holly avait l'impression d'avoir accompli son devoir de maman. Elle était restée debout jusqu'aux premières heures du matin pour effectuer d'ultimes retouches sur le costume de squaw que portait Chloe. Et celle-ci était absolument adorable ainsi vêtue.
Il était important pour toutes les deux de conserver un semblant de normalité et confectionner une tenue pour sa fille était l'un des moyens qu'Holly avait trouvés pour ce faire. Avoir pour mère une enquêtrice de scène de crime n'avait rien de très ordinaire.

Holly Jennings voulait la peau de ce salopard. Elle avait envie de le voir sanglé sur le fauteuil du condamné. Elle rêvait de voir l'aiguille hypodermique reliée à ses veines diffuser graduellement à travers son corps le poison qui le mettrait hors d'état de nuire. Mieux, elle aurait voulu dégainer son Glock 9 mm, le plaquer contre sa tempe et presser la détente. Faire sauter la cervelle du monstre.
Elle se laissa glisser le long de la pente escarpée, écarta les feuillages devant elle en se redressant et sortit de son sac noir une paire de gants de latex qu'elle enfila. Même après quatre années passées au sein de la police scientifique de San Diego, Holly ne s'était toujours pas habituée à l'odeur acre de caoutchouc et au nuage de talc qui se dégageait au moment où les gants claquaient contre sa peau. Un bruit qui sonnait comme un coup de semonce.

Les Collins avaient été emmenés en pleine nuit loin de leur maison de Hillcrest. Personne n'avait rien vu. Patricia Collins était une personne discrète, pas particulièrement sociable, et une mère célibataire dévouée. Elle était abonnée à la salle de sport locale et à une agence de rencontres, mais ces pistes n'avaient rien donné.
Patricia n'avait eu qu'un seul rendez-vous grâce au club de rencontres et l'homme en question était blanc comme neige. Le commissaire mettait déjà la pression sur Holly. Et avec ces nouveaux meurtres, s'ils avaient un lien avec les précédents, il allait être dans tous ses états. Holly n'aimait pas se retrouver face à Tom Greenfield quand il commençait à paniquer.

Des bruits de feuilles mortes écrasées et les paroles de « Sunshiny Day » chantonnées à voix basse annoncèrent l'arrivée de Chad. Au début, elle avait détesté cette apparente désinvolture. Mais chantonner aidait Chad à faire face à l'horreur. Chaque enquêteur avait sa tactique. Face à une victime, Holly se projetait au plus profond de la psyché du tueur. Il fallait qu'elle se détache du crime pour mieux le résoudre. Elle pourrait penser aux victimes comme à des êtres humains vivants et animés une fois l'affaire résolue.

" - Ce salopard est encore plus malade que je le pensais. Est-ce qu'il pense vraiment être un mari et le père, dans cette histoire ? S'il ne les a pas tuées ici, alors soit il est revenu après pour écrire ce mot, soit tout cela était planifié depuis le départ. Auquel cas il a déposé cette note puis les a emmenées. Je ne comprends pas. Pourquoi a-t-il laissé ce mot ? Il nous provoque. On doit lui mettre le grappin dessus, et vite."