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Citation de enkidu_


Pour eux [les Juifs ashkénazes médiévaux], l’Histoire n’était qu’une parabole. Les objets étaient des palimpsestes, et le ciel la tangente au cercle de tous les évènements. Ils portaient la certitude que tout est une allusion à quelque aspect du transcendant, que ce qui se manifeste à l’esprit n’est que la fine écorce de ce qui demeure celé ; et souvent ils préféraient conquérir un point d’appui sur les bords mystérieux de la profondeur, au risque même d’abandonner le sol ferme du superficiel.

Les mots de la Thora, pensaient-ils, ne sauraient être saisis par l’interprétation littérale. Rien ne peut être pris littéralement, ni l’Écriture, ni la nature. Personne, vécût-il mille ans, ne serait capable de sonder les mystères du monde. Rabbi Nathan Spira de Cracovie (XVIIe siècle), l’auteur de « Révélation des Profonds Secrets », donne deux cent cinquante-deux interprétations différentes du Pentateuque où Moïse sollicite de Dieu la grâce d’entre en Terre Promise. Un mot de la Bible, une coutume, un dicton foisonnaient de significations. L’évidence semblait trop superficielle pour être vraie. Seul le mystère possédait un degré suffisant de probabilité ; ce qui était plat, sans profondeur était inconcevable. En toute chose, ils découvraient un sens caché.

Même dans les parties de la Bible qui traitent des lois civiles ou criminelles, ils trouvaient de profondes énigmes. Les noms de villes et de pays se révélaient pleins d’allusions. On alla jusqu’à dériver le nom yiddish de la Pologne, Polin, des deux mots hébreux : po lin, « ici demeurer », mots écrits au ciel sur un papier que les rescapés d’Allemagne découvrirent dans leur fuite vers l’Est à l’époque de la Peste Noire et des massacres de Juifs qui l’accompagnèrent. On racontait aussi que sur les feuilles des arbres étaient inscrits des Noms sacrés, que dans les branches se cachaient des âmes errantes en attente de la délivrance que leur apporterait quelque Juif pieux qui, passant par-là, s’arrêterait pour dire sous l’arbre la prière du soir. (pp. 45-47)
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