AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Jean-Daniel


Je retourne cette fois vers l’isba que mes parents louaient sur la rive du Pruth durant les vacances d’été. À force d’y retourner chaque année, la modeste bâtisse n’avait plus rien de provisoire pour nous. Nous y demeurions un mois, au milieu de tableaux naturels simples et intenses : un champ de tournesols jaune, des grillons argentés qui stridulaient jour et nuit, des plantes d’eaux hautes et touffues ratissées par des oiseaux de proie dont les cris perçants me réveillaient la nuit.
L’isba est exiguë : deux chambrettes, une cuisine qui fait également office de salle à manger. Elle donne sur une cour, un potager, deux cerisiers et des buissons de roses.
Tôt le matin, le propriétaire nous livre une miche de pain paysan, des œufs et des produits laitiers. Le potager est à notre disposition, Maman nous sert gaiement des concombres, des tomates, des radis et des ciboules tout juste cueillis. De nombreux parfums et saveurs ont accompagné mon enfance, mais le goût des légumes de ce potager reste gravé en moi jusqu’à ce jour.
Nous passons la matinée à nager et bronzer sur les rives de la rivière. Les vacanciers sont rares mais reconnaissables à leur style flamboyant. Seule la bourgeoisie juive peut s’autoriser un mois de vacances dans ce paysage pastoral au pied des Carpates.
Le soir, nous buvons du café devant l’isba, accompagnant le crépuscule qui, en cette saison, entraîne dans son sillage les lueurs du jour jusqu’à la nuit profonde. La lumière voilée dans l’obscurité grise et clairsemée ne s’éteint jamais totalement.
Nous n’allons pas rendre visite à la rivière à cette heure, nous la contemplons de loin en écoutant son murmure, absorbant encore tout ce que le jour nous a révélé.
Peu avant minuit, Maman coupe une pastèque dont le rouge excite le regard et dont le goût est un délicieux nectar.
La journée se passe donc sur la rive du Pruth. Ni large, ni bouillonnant, il ne faut pas pour autant se fier à cette apparence paisible : il a plus d’une fois emporté un enfant.
Commenter  J’apprécie          40





Ont apprécié cette citation (4)voir plus




{* *}