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Critiques de Albert Aycard (1)
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La réalité dépasse la fiction

« Deux choses sont infinies : L Univers et la bêtise humaine. Mais, en ce qui concerne L Univers, je n'en ai pas encore acquis la certitude absolue." (Albert Einstein).



Le petit livre que je vous présente aujourd'hui en est la preuve évidente. Pas que l'univers est infini, mais que la bêtise, la sottise, ou pour utiliser un terme contemporain de sens avoisinant, la c… humaine (ici un mot qui rime avec sonnerie, mais qui dénoterait avec la haute tenue littéraire de cette chronique), elles, n'ont pas de limites, et ce dans aucun sens.



Albert Aycard (1922-1998) est homme de lettres et journaliste, Jacqueline Franck (sa pudeur naturelle lui interdit de préciser ses dates de naissance et de décès, mais sait-on jamais) est femme de lettres et journaliste. Tous deux sont pêcheurs de perles. La pêche aux perles est une industrie qui malgré son nom, ne se limite pas au milieu marin. Elle se pratique partout, et particulièrement dans les colonnes de nos quotidiens, où elle se révèle souvent abondante et plus souvent encore lucrative. Non pas en espèces sonnantes et trébuchantes, mais en sourires, rires et fous rires, qui vous amènent infailliblement à une forte envie de bisser (applaudir deux fois, vous aviez bien compris).



Un bon exemple valant mieux qu'une mauvaise explication, voici quelques extraits :



A la rubrique « Faits divers »



Au cours d'une beuverie, André-Roger Nicolay a reçu du concubin de sa soeur un coup de bouteille sur la tête qui lui a ouvert l'artère fémorale (Libération)

Marcel Gagnon, 70 ans, s'est suicidé de 5 coups de révolver à la tempe, tirés chacun à un quart d'heure d'intervalle (La République du Centre)

M. Martin fut si violemment frappé qu'il reprit connaissance (La Dépêche du Midi)

Deux Tunisiens se sont jetés sur deux fillettes de 11 ans, hier à 11h30, rue d'Aix. Ils ont emporté leurs mouchoirs. (La Presse de Tunisie)

Le véhicule s'immobilisa sur ses deux jambes et c'est à lui que les témoins portèrent tout de suite les premiers secours tandis qu'il hurlait de douleur (La Nouvelle République)

Les dégâts matériels sont très importants : un banc et une chaise appartenant à la mairie ont particulièrement souffert de cette rencontre brutale (Le Progrès de l'Oise)

Sur la route nationale Toulouse-Bayonne, les trombes d'eau étaient si épaisses que la visibilité dut être interrompue. (Le Soir de Marseille)

Les trois occupants du véhicule ont été tués, les deux premiers sur le coup, le troisième à son arrivée à l'hôpital de Floirac (La Dépêche du Midi)

Hier soir, à la gendarmerie de Ris-Orangis, seuls deux accidents mortels, sans victimes heureusement, étaient signalés (France-Soir)



A la rubrique « Prédestination » ou « Comme le nom l'indique »



M. SAVON écoute l'allocation de M. BARBE (La Dépêche du Midi).

Mme Veuve LACROTTE informe son aimable clientèle qu'elle continue à fournir les engrais comme par le passé (Sud-Ouest).

M. BOCOUILLON, castreur, prévient son aimable clientèle qu'il a transféré son domicile (L'Union).

M. Robert TROCCON, plombier, s'est fait voler sa camionnette Peugeot (Le Progrès).

Dans son audience du 10 novembre, le Tribunal correctionnel eut à juger une affaire d'attentat à la pudeur reproché à une femme de 48 ans, Mme Olga CUDASSIER (La Gazette Provençale).

Gaston CHAPELET, 42 ans, a été arrêté dans l'église de Saint-Germain-l'Auxerrois, en flagrant délit de vol dans un tronc. Il a été interrogé par l'officier de police LEMOINE (L'époque).

M. TAILLEBOIS, coupeur de bois, a eu trois doigts sectionnés alors qu'il coupait du bois (Courrier de l'Ouest).

Le palais de justice d'Argostoli, nouvellement construit, s'est écroulé au moment où le ministre de la Prévoyance, M. Adamopoulos, venait d'en sortir (Méridional-La France).

Par décision 4477, en date du 11 septembre 1953, Mlle VERGE Désirée, rédactrice de 1ère classe, 1er échelon du cadre local de la Nouvelle-Calédonie, nouvellement détachée au Cameroun, est, pour compter du jour de son débarquement, mise à la disposition de l'inspecteur général du travail à Yaoundé (J.O. du Cameroun).





Depuis la page des sports à celle des spectacles en passant par le carnet blanc, le carnet rose et le carnet noir, ce sont toutes les rubriques du journal qui sont passées ainsi au crible. Et, cerise sur le gâteau, les auteurs nous gratifient d'une anthologie de règlements authentiques de nos administrations, et de comptes rendus de gendarmerie pas piqués des hannetons, autant de petits bijoux qui vous débloqueront (et peut-être rebloqueront, ça s'est déjà vu) les zygomatiques.



« Rire est le propre de l'homme » disait Alcofribas Nasier (François Rabelais). Il aurait pu rajouter « et de la femme ». Mais peut-être les femmes riaient-elles moins à cette époque… C'est sans doute parce qu'elles n'avaient pas « La réalité dépasse la fiction » dans leur bibliothèque… ou leur liste Babélio !

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