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Critiques de Alexis Lacroix (5)
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Penser les frontières

Il s'agit ici de la transcription d'un débat public entre Régis Debray et Benjamin Stora.

Thème du débat : à l'heure de la mondialisation que faire de la notion de frontière ? Debray et Stora diffèrent sur la réponse. Pour Debray, les frontières sont nécessaires, en particulier parce qu'elles sont un rempart pour la démocratie. Stora ne le contredit pas sur ce point, pointe certains dangers et insiste sur la nécessité de s'ouvrir.

Un petit livre de 87 pages qui pose clairement le problème.
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La République assassinée

En presque 130 pages et 8 chapitres diablement efficaces, argumentés et à l'érudition sans faille Alexis Lacroix se plonge et nous plonge dans les 10 années qui s'étalent entre 1922 et 1932, entre l’assassinat de Rathenau (ministre des affaires étrangères de la République de Weimar) et l’accession d’Hitler au pouvoir :

Dix années terribles […] d'une montée des périls et de cette marche à l’abîme comme on a communément appelée cette période .

Avec le concours des philosophes et des écrivains de l’époque on découvre sous un autre angle comment s’est opéré le grand basculement de la civilisation européenne et son effondrement dans la barbarie.



Metropolis, c'est le basculement post première guerre mondiale du centre de d'influence de l'empire austro-hongrois vers Berlin : "À une vitesse fulgurante, la capitale du Brandebourg devient le cœur battant de la modernité, une ville tout en « intencité ». Le centre de gravité de l’espace germanique se berlinise en un éclair. Élargie à de nombreux villages de sa périphérie, Berlin est aussi désormais la mégapole la plus vaste du monde en superficie, et, bien sûr, celle qui possède la scène artistique la plus étoffée, la plus remuante, la plus inventive : trois opéras, une cinquantaine de théâtres, une centaine de cabarets, et plus de trois cents cinémas." Le décor est planté. Le décor d’une tragédie politique.



24 juin 1922 date de l'assassinat Rathenau. Homme issu de la bourgeoisie industrielle allemande. Il est juif. C’est un homme au service de l’idéal républicain. Il est conscient des dangers que représentent pour la République de Weimar certains industriels et de la menace de la montée de la droite nationaliste. La République de Weimar avait mis en œuvre une citoyenneté pleine et entière pour tous les Juifs allemands. Mais ces années d’après-guerre, l’inflation et la misère trouvent un bouc-émissaire tout désigné cle Juif". Ce sont donc deux haines qui vont se mettre petit à petit en place : la haine de la république de Weimar et la haine des Juifs.

Zweig en parle comme de « l’épisode tragique qui marque le début du malheur de l’Allemagne, du malheur de l’Europe ».



La faute aux politiques ?

La suite des événements incombe t-elle aux politiques de Weimar, autrement dit les germes du mal à venir étaient-ils déjà présents ?

Voilà une question qui n'a pas fini de diviser les historiens

"Un régime humain, non violent, légaliste et respectueux des droits – alors que se préparaient en maintes régions du Vieux Continent, le fracas des machiavélismes modernes et la reddition des foules face au virilisme antidémocratique.

Dès lors, il s’en faut de peu pour qu’un narratif se verrouille et « fatalise » l’histoire heurtée des quatorze années de la première démocratie allemande comme la chronique d’un échec annoncé."

Le principal protagoniste du roman d’Alfred Döblin, Berlin Alexanderplatz, paru en 1929, Franz Biberkopf, reflétant un sentiment partagé pendant ces années-là, ce déclassé emblématique s’exclame : « Notre République – un accident de travail ! ». C'est tout dire



L’irrésistible ascension du nationalisme

"L’incendie contre la libéralité weimarienne eut ses pyromanes. Très organisés.

En octobre 1922, soit quelques semaines seulement après l’assassinat de Rathenau, le germaniste français Henri Lichtenberger livre « à chaud » son analyse de la crise allemande, dans L’Allemagne d’aujourd’hui dans ses relations avec la France. Au cœur de la dérive, ce célèbre universitaire inscrit l’action d’un chauvinisme antiparlementaire et hostile aux signifiants d’universalité : « Les nationaux allemands, écrit Lichtenberger, forment aujourd’hui une masse considérable. Ils comprennent, comme naguère, la caste aristocratique des grands propriétaires fonciers et des hauts fonctionnaires d’ancien régime. » Les officiers et militaires de métier licenciés en vertu du désarmement, qui ont perdu leurs privilèges matériels et sociaux, se retrouvent plongés dans une grande précarité. Ce sont eux qui fournissent aux champions du nationalisme une « troupe d’assaut » prête à tous les coups de mains. Les universitaires, professeurs et étudiants, biberonnés à la politique de puissance, ont éprouvé, eux aussi, les meurtrissures de la défaite de 1918."

Pour lui, les mouvements nationalistes se matérialisent par leur refus de participer au pouvoir pour ne pas avoir à assumer la responsabilité de leurs actions et par le rejet du régime républicain aux antipodes des valeurs de l’âme germanique. Sans compte ce famaux ressentiment post 14-18



Qui, maintenant, dompterait les fauves ?

« Quelque chose d’oppressant dans l’air », note Haffner. « Paroles de haine sur les colonnes Morris ; pour la première fois dans les rues, des uniformes couleurs d’excréments surmontés de visages déplaisants ; les pétarades et les sifflements d’une musique inconnue, suraiguë et vulgaire ». Stresemann évanoui, l’auteur d’Histoire d’un Allemand prend brutalement conscience de l’ultra-vulnérabilité de la république car un rempart placide contre la barbarie est tombé : « Qui, maintenant, dompterait les fauves ? » Les « fauves », en cette année décisive, s’étaient déjà répandus partout, sous les traits d’un nationalisme convulsé qui gagnait peu à peu les esprits, les fâchant avec la tempérance démocratique. Et pour cause : « Le nationalisme allemand, écrit l’historien et idéologue Arthur Möller van den Bruck, veut maintenir l’Allemagne parce qu’elle constitue, comme pays du milieu, le seul fondement solide de l’équilibre européen. »

Un juriste Carl Schmitt est un redoutable détracteur de Weimar, il souhaite administrer la preuve que le régime libéral constitutionnel, avec sa « décision fondamentale en faveur de la démocratie parlementaire » trahit… l’objectif de la « vraie » démocratie.

En clair une démocraties illibérale !!! Cherchez l'erreur



Autoroute vers le nazisme

Comment penser le gigantesque envasement d’une civilisation si avancée dans l’irrationnel ? Comment envisager la chute de la grande nation des penseurs et des poètes dans la haine de la Raison ?

Et bien au travers de 4 groupes politiques : la pensée libérale, surreprésentée dans les coalitions gouvernementales à Weimar, la pensée conservatrice, la pensée révolutionnaire et la pensée fasciste.

"L’irréversible engloutissement de la grandeur européenne, à bien y regarder, n’est pas une catastrophe, plaide Spengler, mais la chance de l’Allemagne – son kaïros. « Nous autres, Allemands, nous ne produirons plus un Goethe, mais un César ! » Voilà qui est exaltant – et qui vaut bien de rester serein face à : 1. la destruction nécessaire des médiations parlementaires ; 2. l’abolition de la tempérance démocratique ; 3 la liquidation de ces empêcheurs de révolutionner en rond, de ces interdits, aussi anciens que le Décalogue, d’attenter à l’immémorial humus de notre condition de mortels : les droits de l’homme."



Le rouge, le noir et le gris

L'auteur s'appuyant sur l'exemple de Thomas Mann qui considère La République de Weimar comme tempérée, va très vite changer d'avis avec la mort de Rathenau.

Le parti communiste allemand (KPD) combat le fascisme mais pas le nazisme selon Alexis Lacroix, communistes et nazis ont en commun leur haine du régime parlementaire. Thomas Mann, qui dans un premier temps a critiqué la République de Weimar comme trop tempérée, change d’opinion dès la mort de Rathenau. Ensuite, il défend la République et dénonce dans ses discours et dans ses écrits l’attitude complaisante du KPD envers le parti nazi.



L'auteur le rappelle par ailleurs : "Weimar a succombé du nihilisme de ses ennemis - extrême droite, d'abord, extrême gauche, ensuite, qui, secrètement alliées à distance, ont fait peser une double tenaille fatale sur son libéralisme politique. Souvenons-nous en."



Alexis Lacroix nous offre une leçon de compréhension historique exemplaire : l’enchaînement fatal qui précipita Weimar dans la tombe, portant le nazisme au pouvoir,La force de l'ouvrage est de ne pas s'atteler seulement sur une séquence historique, mais de pousser à la réflexion.

Un livre permettant de :

- comprendre la passé, pas si lointain, tout cela s'est déroulé il y a 100 ans

- le présent, car à l'époque Stefan Zweig évoque l'assassinat de Rathenau comme d'un «épisode tragique qui marque le début du malheur de l'Allemagne, du malheur de l'Europe» , et

- Surtout d’anticiper les lendemains dans lesquelles l'auteur voit. Des "réminiscences spectrales" .



Ce livre important se lit donc aussi comme une mise en garde, au travers des quelques parallèles avec la situation actuelle, évoquant "la réacosphère" , les "antisystèmes actuels", "les adeptes de la démocratie illibérale tel Victor Orban (qui en supprimant les contre-pouvoirs, en soumettant le parlement et en muselant la presse, s’est fait le chantre et le propagandiste, tout en redirigeant la hargne des foules vers des cibles commodes comme le philanthrope « mondialiste » Georges Soros, avant que le président de la Russie, Vladimir Poutine, lui vole dans une abjection sidérante la palme de l’avant-gardisme despotique en lançant, en février 2022, une guerre de conquête impériale et sanglante contre l’Ukraine démocratique...



N'est-ce pas Thucydide qui a dit : L'histoire est un perpétuel recommencement.....

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La République assassinée

Il y a un siècle, l'assassinat de Walther Rathenau sonnait le début de l'agonie de la République née en 1918.


Lien : https://www.lefigaro.fr/livr..
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J'accuse : 1898-2018

Je ne connais pas du tout Alexis Lacroix. Selon le quatrième de couverture, il travaille à "L'Express" (l'hebdomadaire). C'est en 2018 qu'il a publié ce livre très bref, au titre emblématique. Dans un premier temps, il revisite l'antisémitisme qui s'est développé pendant l'affaire Dreyfus: Barrès, Drumont, Maurras et consorts sont épinglés. Mais les ambiguïtés de personnalités situées à gauche de l'échiquier politique - et de Jean Jaurès lui-même - sont aussi pointées. A gauche, la question sous-jacente était: « L'antisémitisme est-il soluble dans le socialisme ? »

Après la seconde guerre mondiale, le PCF et l'extrême-gauche (Sartre en tête) ont pris des positions nettement anti-israéliennes, en raison de leur solidarité avec les Palestiniens notamment; parmi les intellectuels de haut vol, seul Raymond Aron s'est opposé à ce tropisme. Maintenant, des personnalités connues (parmi lesquelles on comptait Manuel Valls) dénoncent l'islamo-gauchisme, dont le nom même indique la conjonction d'idéologies opposées; il envahit une partie de notre paysage idéologique. Personnellement je trouve que la situation actuelle du débat n'est pas assez analysée dans cet ouvrage.

Mais surtout, le problème crucial de bien distinguer entre l'antisémitisme, l'antisionisme et le projet de destruction de l'Etat d'Israël est très mal traité par A. Lacroix. J'ajoute que sa manière d'écrire m'a semblé pénible…
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J'accuse : 1898-2018

Dans son nouveau livre, J'accuse!, notre collaborateur Alexis Lacroix revisite l'affaire Dreyfus pour décrypter l'antisémitisme contemporain.
Lien : https://www.lexpress.fr/cult..
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