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Citation de enkidu_


Examinons, à présent, les points de vue exprimés par les Anciens et autres non-chrétiens lorsqu’ils parlaient de religions différentes de la leur. Nous avons déjà cité Philon d’Alexandrie. Plutarque parle avec une ironie amère des évhéméristes grecs, « qui sèment l’athéisme dans le monde entier, en oubliant les dieux de nos croyances et en leur donnant les noms de généraux, d’amiraux et de rois », et des Grecs qui ne sont plus capables de distinguer Apollon (le Soleil intelligible) et Hélios (le Soleil sensible). Il poursuit en déclarant: « On ne peut pas dire que chaque peuple ait des “dieux différents”, ni qu’il existe des dieux “grecs” ou des dieux “barbares” parce que les dieux sont communs à tous, bien que les différents peuples leur donnent des noms différents. C’est pourquoi l’Unique Raison (Logos) ordonnatrice de l’univers, l'Unique Providence préposée au cosmos ainsi que les puissances mineures [les dieux, les anges] préposées à toutes choses, reçoivent des noms et des cultes différents parmi chaque peuple, selon la diversité des coutumes et des usages respectifs ». Apulée reconnaît que l’Isis des Égyptiens (notre Mère Nature et Madone, Natura Naturans, Creatrix, Deus) « est adorée dans le monde entier sous des formes nombreuses, par des rites divers, sous des noms multiples ».

L’empereur musulman de l’Inde, Jahângîr, écrivant au sujet de son ami et maître, l’ermite hindou Jadrûp, dit que « son Vedânta est identique à notre Taçawwuf ». Dans le nord de l’Inde, il existe, en fait, une abondance de textes religieux dans lesquels il est souvent difficile, sinon impossible, de distinguer les éléments musulmans des éléments hindous. L’indifférenciation des formes religieuses est, à vrai dire, comme le remarque le professeur Nicholson, « une doctrine fondamentale du soufisme ».

Ainsi Ibn Arabî déclare :

« Mon cœur est capable de toute forme : il est un pâturage pour les gazelles et un couvent pour les moines chrétiens
Et un temple pour les idoles, et la Kaabah du pèlerin,
Et la table de la Thorah et le livre du Qoran ;
Je suis la religion de l’Amour, quelque route que prennent ses chameaux ; ma religion et ma foi sont la vraie religion ».

Cela signifie que vous et moi, dont les religions sont distinctes, nous pouvons dire, chacun: « Ma religion est la vraie religion » et, s’adressant à l’autre: « Votre religion est la vraie religion » - le fait que l’un d’entre nous ou tous deux nous soyons ou non authentiquement religieux ne dépendant pas de la forme de notre religion, mais de nous-mêmes et de la grâce. C’est pourquoi Shams-i-Tabriz s’exprime ainsi :

« Si la notion de mon Bien-Aimé est à découvrir dans le temple des idoles,
Ce serait péché mortel de tourner autour de la Kaabah !
La Kaabah n’est qu’une église si l’on y perd Sa trace :
Ma Kaabah est toute “église” où je puis trouver Sa trace ! » (pp. 57-58)
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