Anne-Lise Roux

Dans la journée,je lis tout.Les bibles,posées sur les tables de chevet quand on va à l'hôtel.Les consignes affichées sur le mur,à respecter en cas d'incendie.Des livres sur les animaux.Ce qu'il y a d'inscrit sur les boîtes de médicaments pour les chiens.Des fois,je m'évade.Je m'enfuis par la fenêtre des motels,je saute du premier étage.Ou alors Papa m'ordonne de sortir promener Flash,le bull-terrier.On flâne,on se paie du bon temps.

SWITCH!!crie Papa.SWITCH,SWITCH,SWITCH?Attends voir.
D'après ce que j'ai compris,les oiseaux n'auront même plus d'yeux.Ils n'y verront plus rien et se cogneront aux arbres,aux pylônes électriques.Ils seront dans le noir,comme quand Papa m'enferme.Les oiseaux n'auront même plus d'yeux,ni de bec pour manger.Leurs ailes seront toutes cassées,leur langue pendra en dehors de leur bec,sauf qu'ils n'en auront plus.Sûr et certain,je l'ai lu dans un journal.Si Papa veut que j'éteigne la lampe,j'éteins.Le docteur est venu quand j'ai eu le bras cassé.Il a dit si votre fils se recasse encore un bras,je vous préviens que je serai forcé de le signaler.Et puis comment ça se fait qu'il n'aille pas au lycée?On a encore changé de ville.Dans le noir,mes yeux continuent de voir.La nuit, souvent,je vois les cintres,les fourrures.Les cintres sentent bon,la fourrure aussi.J'aime bien le placard de l'entrée,celui qui sent l'antimite,la naphtaline.