Signe des temps : la Butte avait perdu son originalité. La bohème artistique et littéraire qui buvait à crédit, ou payait en dessins, poèmes, et chansons, s’était éclipsée devant l’élite boboïde.
Les lecteurs de Laurent Obertone, qui n’a pas rédigé ce livre pour se faire des amis, ajuster ses plans de carrière, ou devenir un pantin du théâtre médiatique, savent désormais que les plus enclins à fustiger les amalgames mettent cent cinquante mille têtes de policiers dans un même bonnet ; que la justice est rongée de l’intérieur par l’idéologie politique ; et que les familles des malfaiteurs font bloc derrière eux, de connivence avec des jeunes du quartier qui n’étaient pas là mais qui ont tout vu.
— Pour revenir à mon amaxophobie – qui est, au cas où tu serais trop paresseux pour ouvrir un dictionnaire, la peur maladive de mettre les mains sur un volant –, sais-tu que deux cents millions d’animaux meurent chaque année sur les routes d’Europe, tués par d’abjects écrabouilleurs ?
— Navré de l’apprendre, patron.
— Vivement que l’on dénonce les actes de maltraitance, et qu’un numéro d’urgence leur soit attribué ! Mon plus cher souhait : que tous ceux qui les tuent, ou qui leur font subir les pires souffrances, atterrissent dans le box des accusés, soient jugés et condamnés, sans aménagements de peine, ni libération conditionnelle. Devraient y atterrir les amoureux de la chasse et de la corrida, les producteurs de foie gras, les sadiques qui piègent les souris et les oiseaux sauvages à la glu, les éleveurs de visons, et autres dépravés.
Le « Triton » de Carla Bruni et le « Flanby-Hollande » de Julie Gayet avaient au moins pour eux d’être moins hypocrites que le Jupiter qui nous sert de chef d’État et se rêve dieu du ciel et des orages. J’en ai ras le bol de ses choquantes privautés de langage, et de ses coups de barre à droite, puis à gauche.
Actuellement, la laïcité est mise à mal, la République à rude épreuve, la morale bafouée, l’autorité défiée, et les groupes sectaires n’ont jamais autant privé les foules crédules de leur libre arbitre.