Il est tentant, dans un récit de voyage, de négliger les moments où il ne se passe rien, de condenser dans une indication du nombre d'heures écoulées les plages sans événements, sans rencontres, sans grande variation dans le paysage. Dire le silence et le vide n'a pas grand sens et pourtant ces moments sont des plus riches. Je marchais sans montre ; le temps n'était fonction que de mon humeur, de la fatigue, du courage, de la faim, de l'ennui, de la longueur d'un morceau de musique. Je ne retrouvais l'heure des aiguilles qu'une fois les tentes montées et les bagages défaits, au moment même où le coucher du soleil la rendait d'ailleurs inutile.