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Citation de Charybde2


Les fictions de Nos futurs solidaires ne sont pas des utopies, ou du moins jamais totalement. « L’affection » de Régis Antoine Jaulin pourrait certes faire figure de curieuse farce utopique, mais ce serait pour le coup la conséquence d’un clin d’oeil de l’histoire : son scénario de propagation d’un virus, non pas du covid-19, mais d’empathie, est paru dans sa première version en novembre 2018 dans le troisième numéro de la revue Visions solidaires pour demain. Et son utopie, pour peu qu’on puisse qualifier ainsi son récit en cinq témoignages aussi drôles que contrastés, sonne parfois de façon grinçante.
Y a-t-il en revanche des dystopies parmi les quatorze nouvelles de l’anthologie ? Pas vraiment non plus. Les scènes d’interrogatoire de « Reliance », la nouvelle de Sabrina Calvo, ont certes quelque chose de glaçant. L’atmosphère y est pesante. C’est pourtant de l’hôpital un peu cassé qu’elle décrit et grâce à d’étranges « nanites », bio-puces issues de la nanotechnologie qui ont été implantées dans les yeux de son personnage Tirésias, que naît la magie collective et elle aussi mystérieuse des « Jours Heureux ».
Ces deux nouvelles de Régis Antoine Jeulin et de Sabrina Calvo, et sans doute plus encore celle de Ketty Steward qui clôt le volume, « Six faces d’un même cube », montrent à quel point l’utopie et son ombre la dystopie se dissolvent pour le meilleur dans ce que l’on pourrait appeler selon le terme du chercheur Yannick Rumpala des « prototopies » du futur. Des exercices de narration et de pensée où le lecteur se projette comme pour explorer des possibles pour demain, naviguant sans cesse entre les deux polarités de l’utopie et de la dystopie. Les quatorze fictions de Nos futurs solidaires prennent acte d’un contexte écologique, social et politique aux humeurs de catastrophe, mais non sans clés de réinvention d’un autre type de société, basée peut-être sur des valeurs moins productivistes, plus proches de l’économie sociale et solidaire. Quoi qu’il en soit, leurs histoires portent des imaginaires non pas détachés mais profondément intriqués dans notre réel, même lorsqu’elles s’appuient sur des révolutions technologiques ou vitales qui nous semblent pour le moment impensables, inconcevables. Par les folies d’une empathie virale, d’une capacité subite de guérir par le regard ou d’identités numériques aussi vivantes et reliées que certains humains rencontrés parfois sur le terrain des initiatives de solidarité, ces oeuvres de fiction nous offrent d’autres façons de regarder et d’agir sur notre monde dès à présent.
(Ariel Kyrou, in Introduction de l’ouvrage)
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