Aurore Sabouraud-Séguin

Tout le monde risque de développer des troubles plus ou mins envahissants et ingérables à la suite d'un choc violent et vital. Il est impossible de prévoir quelle sera la réaction à l'événement, bonne ou mauvaise, active ou passive, raisonnable ou non...

Les débats, les expertises sont autant d'épreuves qui risquent de réveiller la douleur, la souffrance. Dans le chemin qu vous devrez parcourir, le plus dur sera le sentiment d'être mis en doute et de répéter sans cesse la même chose. Le discours de la défense et les arguments mis en avant pour défendre l'agresseur augmentent votre sentiment d'injustice.

... le thérapeute doit faire face à une situation différentes de celles qu'il a l'habitude de côtoyer dans son cabinet ou à l'hôpital ; en général, il travaille sur les croyances, les émotions et la vérité propre à ses clients, peu souvent sur l'irruption brutale et réelle du danger de mort. Le thérapeute a appris à différencier ses émotions et ses sentiments, à ne pas mélanger les faits de son histoire avec ceux de son patient. Mais le récit des événements vécus par les victimes vient brutalement rendre la relation plus inconfortable : cette histoire pourrait lui arriver aussi. Le thérapeute, comme l'entourage d'une victime, risque de prendre une distance trop grande par rapport au récit et donner ainsi le sentiment à la victime d'être mise en doute ; il ne peut supporter ni accepter cette réalité et occulte ainsi l'histoire traumatique du patient, donnant à  celui-ci l'impression de ne pas être entendu et de tourner en rond dans sa thérapie.

Quand l'émotion est ingérable, trop intense, la personne essaie d'arrêter ses pensées a sujet de l'événement traumatique. Cet évitement bloque le processus d'assimilation et d'accommodation nécessaire. Les efforts vont se développer en alternant la tentative de donner un sens pour assimiler l'expérience à affronter le souvenir provoquant ainsi la reexpérience de l'angoisse) et la volonté de fuir l'angoisse par l'évitement des souvenirs et des émotions négatifs. La tension entre le besoin de trouver un sens et le besoin de fuir maintient la personne dans un niveau d'activation neurovégétative élevé. Les évitements se maintiennent, les interprétations négatives se généralisent ; tous ces symptômes caractérisent l('état de stress post-traumatique.

Attention :
Il faut le répéter, être mis en face à sa propre mort, pou à celle d'une autre personne, suffit pour développer une détresse telle qu'elle risque de bouleverser le bon déroulement d'une vie.Certains stéréotypes inclinent à penser qu'un "homme fort" doit supporter sans se plaindre les épreuves dures de la vie, et qu ceux qui ressentent des troubles seraient des personnes à caractère faible. Ainsi, il était admis qu'une femme réagisse moins bien, aille mal plus longtemps, car une "femme est plus faible".De nombreux auteurs ont écrit, et certains le pensent encore, que seuls ces personnes fragiles et ayant déjà des problèmes psychologiques pouvaient avoir une réaction pathologique durable après un choc.Il n'en est rien.

En évitant de retourner dans certains lieux, ce n'st pas le danger que vous voulez éviter, mais la peur (anticipation) : 'la peur d'avoir peur".
Un évitement, dans ce cas, ne se comprend pas comme une phobie. Quand il s'agit de faire disparaître une phobie (peur des araignées, par exemple). k est nécessaire de s'exposer à l'objet de la peur (l'araignée). Ici, dans le cas d'un traumatisme, il n'est pas question de s'exposer à l'objet (le traumatisme), bien sûr, mais aux motions (la peur, la honte...) qui y sont associées.

Dans le cadre du stress post-traumatique, il s'agit pour moi de redonner, en quelque sorte, l'ordre des priorités : il s'est passé quelque chose de terrible qui doit être pris en compte d'abord, puis cet événement doit s'effacer pour faire partie du passé et laisser la place, petit à petit, à l('individu et à ses désirs. 
C'est vous et votre potentiel qui devez finalement être le plus important à vos yeux. C'est pour vivre votre vie, pleine et riche d'expériences bonnes ou mauvaises, que doivent porter tous vos efforts.

... pour diminuer l'intensité de "l'émotion-souvenir" associée à "l'émotion-image", il faut répéter l'exposition jusqu'à obtenir un effet d'habituation. C'est ce qui se passe quand nous avons affaire à un événement particulier et difficile, nous y pensons de façon presque obsessionnelle, nous retournons maintes fois dans notre tête les données du problème, nous revoyons la séquence qui nus perturbe, nous nous remettons en scène pour trouver une meilleure conclusion : nous ruminons. Et puis cela finit par passer.

Action ou inhibition, il est difficile de prévoir quel sera notre comportement dans telle ou telle situation de danger, mais ce qui est sûr, c'est que l'objectif sera de survivre.?
L'angoisse qui accompagne cette réaction est normale et utile dans les situations de danger. Elle a un double rôle de signal : - signal psychologique pour évalue la situation afin de se préparer à la fuite ou à l'affrontement,- signal biologique pour mettre en route le changement physiologique nécessaire à la réponse comportementale.

Il faut de l'expérience et de la maturité pour écouter, sans rejet et sans souffrir soi-même, quelqu'un parler de violence, de terreur ou d'une menace de mort qu'il a vécue. Personne, dans notre environnement actuel, n'est préparé à cela. On se contente de l'idée que la personne a survécu, le reste, on préfère l'oublier. C'est humain, nous faisons tous la même chose. Mais nous pouvons être un peu plus attentifs à ne pas blesser l'autre, il suffit quelquefois de peu de choses.