Axel Bartoli

Les jardins d’Orient sont le fruit d’histoires et de rencontres entre civilisations qui imprègnent encore notre mémoire. Les temps les plus reculés voient l’apparition de Babylone ou de Ninive, et leurs jardins suspendus, mêlant mythes et réalités. Les jardins d’Orient évoquent aussi les palais et leurs mystères, dans la tradition des mille et une nuits et leurs racines perses. Ils s’épanouissent dans l’Espagne maure avec l’Alhambra, qui marque la fin d’un royaume arabe et le début de la découverte du Nouveau Monde. L’inspiration des jardins d’Orient bascule alors de l’ouest vers l’Inde et les Moghols, qui nous laissent le trésor du Taj Mahal. Elle imprègne notre Moyen Âge autant que le XIXe siècle romantique. Elle inspire Majorelle à Marrakech au XXe siècle.

Parmi les vestiges des archives royales qui nous sont parvenus, un inventaire énumère 370 grenadiers, 400 figuiers, 450 néfliers, sans parler des mûriers, des cyprès et des genévriers. Lorsque, au IIIe siècle avant notre ère, les sages de la bibliothèque d’Alexandrie sont conviés à présenter un classement des sept plus belles merveilles du monde, ils glissent dans leur classement, plusieurs fois modifié, deux ouvrages d’art qui ne sont pas le fait des Grecs, mais d’autres peuples : les pyramides d’Égypte et les jardins suspendus de Babylone.

Restent les hommes maintenant. Qui, chaque jour, affrontent le vent, le sable, l’aridité, la chaleur et bien sûr l’éloignement du monde. Aujourd’hui, dans les oasis sud-marocaines, entre dix et quinze personnes vivent et entretiennent ces écosystèmes qui se tarissent, faute à l’exode de ses habitants attirés par les lumières du monde. Comme si le désert reprenait le pouvoir ou se vengeait de cette intrusion antédiluvienne de l’homme.