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Citation de Woland


[...] ... Un pharmacien, ancien stagiaire de l'Ecole d'application des services de santé pour l'Armée de terre, au Val-de-Grâce, à Paris, m'explique que, quelques semaines après l'autopsie de Robert Boulin, "le professeur titulaire de la chaire de Chimie, Toxicologie & Expertises dans les armées, le professeur Jean Meunier [aujourd'hui décédé], toxicologue réputé", lors d'"un cours aux jeunes médecins et pharmaciens militaires sur la conduite à tenir en cas de tentative de suicide au casernement" a tenu à préciser que "les benzodiazépines, employées seules, ne pouvaient amener à une issue fatale." "Il a même ajouté, avec un peu d'emphase," me précise l'ancien stagiaire aux armées, "que s'il était commis comme expert toxicologique dans une affaire où un décès semblait imputable au diazépam seul, il se faisait fort de démontrer le contraire. Je crois que la totalité de l'assemblée a compris qu'il faisait allusion à l'affaire Boulin."

Dans son arrêt de non-lieu, la chambre d'accusation de la Cour d'Appel de Paris considère pourtant qu'"il ne saurait être sérieusement contesté qu'une telle quantité" de diazépam "a entraîné de façon très importante les effets du produit, à savoir une sédation intense, un relâchement musculaire et également une dépression respiratoire qui expliquent la noyade dans une eau peu profonde."

Le dictionnaire médical Vidal indique effectivement que la "dépression respiratoire" fait partie des conséquences possibles d'un surdosage en diazépam. Mais le Vidal précise bien qu'un surdosage ne peut qu'"exceptionnellement" provoquer "un décès." Pour "espérer" se noyer dans si peu d'eau, il aurait fallu choisir un médicament aux effets nettement plus radicaux, comme les barbituriques.

Ce n'est sans doute pas un hasard si, comme on l'a vu, immédiatement après la mort de Robert Boulin, les premières "fuites" dans la presse parlent - faussement - de l'absorption de barbituriques par le ministre. Même les policiers du SRPJ de Versailles qui concluent sans barguigner à "un suicide par noyade, précédé d'une forte absorption de Valium", se sentent obligés d'écrire que, "lors des constatations effectuées, il paraissait peu vraisemblable que le ministre ait pu se noyer dans soixante centimètres d'eau, sans adjonction extérieure." (Rapport de synthèse du SRPJ de Versailles - 29 novembre 1979). C'est donc sur cette "adjonction extérieure", c'est-à-dire le Valium, que repose la thèse du suicide par noyade.

Même en imaginant que Boulin ait réellement absorbé de son plein gré 80 milligrammes de Valium avant de se laisser choir dans l'étang Rompu, le simple contact avec une eau à température de 10 degrés [= température constatée par les enquêteurs sur procès-verbal, le 29 octobre 1979, sur indication des plongeurs] aurait instantanément annulé l'effet décontractant et soporifique du médicament. Le réflexe de survie aurait mécaniquement fonctionné. D'autant que Robert Boulin était excellent nageur ...

On s'explique mal pourquoi le ministre aurait choisi une substance relaxante aux effets mortels quasi nuls comme le diazépam pour tenter de se noyer dans 60 centimètres d'eau. Malgré ces invraisemblances, le SRPJ de Versailles conclut sans rire qu'"une prise massive de Valium, accidentelle ou volontaire, provoque des signes de somnolence ou de vertige tels qu'ils peuvent expliquer le fait qu'une fois dans l'eau M. Boulin n'ait pu se défendre de la noyade, alors même qu'il avait pied." ... [...]
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