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Citation de BMarfaing


Extrait - Aerik l'Auroch :

— Attends un peu, fit mon père me rattrapant. Que tu sois mon fils ou non, ne change rien au fait que, seuls les hommes peuvent participer au voyage des Vikings.

— Et alors ? répondis-je, je suis un homme.

— Pas encore, tu n’es qu’un garçon pour l’instant. Il faut que tu aies ton rite de passage à l’âge adulte d’abord.

— Mais c’est vers seize ans que les garçons passent ce rituel. Je n’en ai que treize.

— Eh bien, tu devras le passer d’ici trois jours. Pas de rite de passage, pas d’expédition en navire.

— Et ça consiste en quoi, le rite de passage ? demandai-je.

— Et bien, tu devras…

Là-dessus, mon père hésita un instant et jeta un œil vers Fromund, qui ne bougeait déjà plus.

— La coutume veut, poursuivit-il, que l’homme en devenir se munisse d’une lance et aille chasser un auroch. Seul.

Ce fut comme un coup de massue, comme s’enfoncer la tête dans un casque trop petit, comme manquer de souffle sous l’eau. Les aurochs, bêtes énormes, armées de gigantesques cornes, sont particulièrement hostiles aux humains. Plus gros qu’un taureau. Plus agressifs qu’un loup. Ils sont le symbole de la virilité. Je ne pouvais pas me mesurer à eux. Ce n’était pas possible.

Je me tournai vers Fromund, qui venait d’en affronter un. Il gisait, Meldun à ses côtés, contusionné, lacéré, dépecé comme un simple morceau de viande. Il fit un dernier mouvement en s’écriant : « Bersek ! », puis il retomba, mort.

Extrait - À la recherche du Sultan Insultant:

Il y a très longtemps, entre le Tigre et l’Euphrate, régnait le sultan El Aikfah-Ouardabeh B’heibeitnikh Latishmah, premier du nom. Mais avec un nom si compliqué, personne ne l’appelait ainsi. En vérité, en sa présence, on disait « Votre Magnificence », ou « Votre Suprême Altesse », mais en son absence, on disait qu’il était le Sultan Insultant.

On l’avait affublé de ce sobriquet à cause de sa manie de dire des choses blessantes sans même s’en rendre compte. Par exemple, lors de la visite de Vladimir le Vizir, le sultan lui dit : « Mais… votre femme n’est pas aussi laide qu’on le dit ! » Ou encore, lorsqu’il rendit visite au Roi Godefroy, il s’exclama en ces termes : « Mon cher ami, vous n’avez pas changé d’un poil ! Vous en avez toujours autant qui vous sortent du nez et des oreilles ».

Le Sultan Insultant avait deux enfants : un fils de dix-sept ans, Tarek, et une fille de quatorze ans, Salima. Leur mère était morte depuis quelques années. Les enfants avaient grandi dans la grande cité du sultanat, juchée sur une colline. Du côté du soleil levant, la route montait vers les énormes portes qui s’ouvraient sur les dédales de ruelles. Du côté du soleil couchant poussait une végétation épineuse et inhospitalière. Une rivière tranquille contournait la colline par le nord. Les murs de pierre blanche de la ville étaient percés de fenêtres sur lesquelles les habitants accrochaient des cages à oiseaux magnifiquement travaillées. Ainsi, où que l’on fût, on pouvait les entendre chanter.

Tarek avait les cheveux marron et aimait monter à cheval avec sa tunique rouge et noire. Salima avait de longs cheveux noirs et adorait écouter les légendes que les vieux lui contaient. Ils passaient presque tout leur temps ensemble, et pourtant, ils ne cessaient de se disputer.

— Face-de-cochon, ça, c’est ma place !

— Tais-toi ou je te tire les cheveux.

— Essaye un peu pour voir ; et pousse-toi, c’est ma place.

— Eh ! Pourquoi tu me pousses ? J’étais là avant toi, face-de-rat.

— C’est toi la face-de-rat.

— Aïe, lâche-moi les cheveux ou je le dis à Papa. Aïe ! Papaaaaa !

— Chut, idiote.

— Alors, pousse-toi…

Il n’y avait rien à faire pour les séparer ou les empêcher de se chamailler. Par contre, on ne les voyait jamais en présence de leur père. Ils détestaient se trouver devant lui, car il avait toujours des mots blessants à leur servir. « Mais comment ! mon garçon, tu es toujours aussi maigre ? Tu ne seras donc jamais un homme ! », lançait le sultan à son fils. « Salima, pour une fille, tu n’es pas si stupide », s’était-il exclamé, alors que le précepteur de sa fille venait de louanger les mérites de sa pupille.

Extrait - La barbare:

Un jour, Dioscore appela sa fille dans son bureau, une pièce petite, mais belle, où la fenêtre permettait au soleil de venir éclabousser de couleurs les tapis et les meubles de bois travaillé.

— J’ai une heureuse nouvelle pour toi, lui annonça-t-il, tu vas te marier.

Sa fille ne répondit rien, ses jambes devinrent molles, sa gorge s’assécha, son poing se serra.

— Avec le Cheikh Al-Barib…

— Je ne veux pas ! hurla-t-elle tout d’un coup.

Cet élan de colère surprit Dioscore, mais il resta très calme.

— Tu feras ce que je te dicterai.

— Non.

— Il est riche, continua Dioscore.

— Il est laid, répliqua sèchement sa fille.

— Il est puissant, répondit le père.

— Il est vieux, claqua la fille.

— Pas plus vieux que moi. Je ne veux plus en entendre parler. De toute façon, l’affaire est conclue.

— Je ne veux pas, je ne peux pas. J’en aime un autre. Il n’y a que lui. C’est lui que j’épouserai, non pas un vieux vicieux.

— Comment ? fit Dioscore avec l’intensité d’un serpent prêt à mordre. Tu aimes ? Qui est-ce ? Qu’as-tu fait avec lui ?

Il la saisit par les épaules.

— Qu’as-tu fait avec lui ? Réponds-moi !

— Que veux-tu dire ? bredouilla la fille impressionnée, nous… nous passons notre temps ensemble. Nous dessinons dans le sable, nous attrapons des criquets pour attirer des lézards, nous dévalons la grande butte à la course. Rien de mal, père, rien de mal. Mais je l’aime, lâche-moi.

Dioscore se ressaisit, lâcha sa fille et alla près de la fenêtre.

— Qui est-ce ? demanda-t-il encore.

— Tu ne le connais pas. C’est un garçon de la cité. Un chrétien.

Dioscore pouffa de rire.

— C’est complètement ridicule, s’exclama-t-il. Un chrétien ! Pourquoi pas un babouin ?

Ce fut comme une insulte pour la jeune fille. Cracher sur les chrétiens, c’était cracher sur son amour, sur elle-même.

— Les chrétiens sont pauvres, renchérit Dioscore.

— Je suis chrétienne moi aussi, lança la jeune fille, froide de rage.

La gifle de Dioscore partit d’un coup, avec tant de force qu’elle projeta la jeune fille à terre.

— Quand t’es-tu fait baptiser ? demanda le père.

— Je ne me suis pas fait baptiser.

— Alors tu n’es pas chrétienne, idiote.

— Je le serai dès que je sortirai d’ici.

— Dans ce cas, tu ne sortiras plus. Dès à présent, ta chambre sera la plus haute salle de la tour, il te sera interdit d’en sortir. Tu n’en sortiras que pour te marier avec le Cheikh Al-Barib. Ensuite, ce sera à lui de t’enfermer.

Extrait - Le Prince-Araignée:

Saviez-vous qu’il y a très longtemps, toutes les araignées vivaient ensemble dans un vaste royaume gouverné par le Roi-Araignée ? La lignée de ce roi était tellement longue, qu’aucune de ces bêtes ne connaissait le fondateur de la dynastie. Lorsqu’un roi mourait, ce n’était pas l’aîné de sa progéniture qui héritait du titre, mais bien le dernier-né.

Il se trouva un jour que le Roi-Araignée mourut, on alla donc s’enquérir de l’éclosion imminente des derniers œufs fécondés par le défunt. Lorsque tous eurent éclos sauf un, on mit l’œuf dans un filet de toile brillante et on le plaça sur le trône. Cette araignée-là naîtrait pour régner sur le royaume Arachnide. Des araignées veillaient en permanence l’œuf et deux rangées de gardes à l’affût s’étendaient devant le trône. Une musique solennelle était jouée et personne n’avait le droit de toucher l’œuf.

L’œuf mis beaucoup de temps avant d’éclore. Des rumeurs commençaient même à circuler au sujet de la viabilité de cet œuf. Mais un jour, l’œuf finit par éclore enfin. On confia l’éducation du petit Prince-Araignée à un précepteur austère et rigoureux. Le Prince n’était pas très doué pour tisser, cependant il était très curieux :

— Pourquoi dois-je apprendre à tisser ? demanda-t-il au précepteur.

— Parce que c’est ce que font les araignées, mon prince. Nous tissons pour attraper nos proies.

— Que faisons-nous avec nos proies ? Est-ce que tous les animaux tissent des toiles ? Et pourquoi m’appelles-tu prince, ne suis-je pas encore le roi ?

— Pas encore, tu dois d’abord fabriquer ta toile maîtresse et attraper ta première proie. Mais tu poses trop de questions. Allez, au travail ! Tu dois te pratiquer encore, ton tissage laisse à désirer.

Le prince était un tellement piètre tisserand que le précepteur s’inquiétait.

— Non, non, et non ! fit-il en examinant les nœuds de son apprenti. C’est lâche et irrégulier, non seulement indigne d’un monarque, mais une honte à la nation toute entière.

Le prince aurait préféré rêvasser sur une feuille ou poser d’autres questions à son précepteur, mais il ne voulait pas faire honte à la nation, il passa donc tout son temps à travailler, pratiquer et répéter. Il devait vérifier deux ou trois fois tous ses nœuds, ses fils, ses ancrages et les refaire encore et encore, jusqu’à ce que son travail soit impeccable. Cela lui prenait un temps formidable, mais c’était la seule manière d’y parvenir.

Le Prince-Araignée ne se sentait pas né pour ce travail. Combien de fois au beau milieu de la nuit, alors qu’il travaillait encore, s’était-il surpris à contempler les étoiles, la forme saugrenue d’une branche ou la chute délicate d’une feuille ? Il se ressaisissait alors et redoublait d’efforts pour être à la hauteur de sa position.

Cependant depuis quelque temps, lorsqu’il levait la tête, il voyait la plus belle de toutes ces délicieuses visions. Un papillon svelte, gai, brillant, coloré et agile, virevoltait tranqu
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