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Citation de BMarfaing


Saviez-vous qu’il y a très longtemps, toutes les araignées vivaient ensemble dans un vaste royaume gouverné par le Roi-Araignée ? La lignée de ce roi était tellement longue, qu’aucune de ces bêtes ne connaissait le fondateur de la dynastie. Lorsqu’un roi mourait, ce n’était pas l’aîné de sa progéniture qui héritait du titre, mais bien le dernier-né.

Il se trouva un jour que le Roi-Araignée mourut, on alla donc s’enquérir de l’éclosion imminente des derniers œufs fécondés par le défunt. Lorsque tous eurent éclos sauf un, on mit l’œuf dans un filet de toile brillante et on le plaça sur le trône. Cette araignée-là naîtrait pour régner sur le royaume Arachnide. Des araignées veillaient en permanence l’œuf et deux rangées de gardes à l’affût s’étendaient devant le trône. Une musique solennelle était jouée et personne n’avait le droit de toucher l’œuf.

L’œuf mis beaucoup de temps avant d’éclore. Des rumeurs commençaient même à circuler au sujet de la viabilité de cet œuf. Mais un jour, l’œuf finit par éclore enfin. On confia l’éducation du petit Prince-Araignée à un précepteur austère et rigoureux. Le Prince n’était pas très doué pour tisser, cependant il était très curieux :

— Pourquoi dois-je apprendre à tisser ? demanda-t-il au précepteur.

— Parce que c’est ce que font les araignées, mon prince. Nous tissons pour attraper nos proies.

— Que faisons-nous avec nos proies ? Est-ce que tous les animaux tissent des toiles ? Et pourquoi m’appelles-tu prince, ne suis-je pas encore le roi ?

— Pas encore, tu dois d’abord fabriquer ta toile maîtresse et attraper ta première proie. Mais tu poses trop de questions. Allez, au travail ! Tu dois te pratiquer encore, ton tissage laisse à désirer.

Le prince était un tellement piètre tisserand que le précepteur s’inquiétait.

— Non, non, et non ! fit-il en examinant les nœuds de son apprenti. C’est lâche et irrégulier, non seulement indigne d’un monarque, mais une honte à la nation toute entière.

Le prince aurait préféré rêvasser sur une feuille ou poser d’autres questions à son précepteur, mais il ne voulait pas faire honte à la nation, il passa donc tout son temps à travailler, pratiquer et répéter. Il devait vérifier deux ou trois fois tous ses nœuds, ses fils, ses ancrages et les refaire encore et encore, jusqu’à ce que son travail soit impeccable. Cela lui prenait un temps formidable, mais c’était la seule manière d’y parvenir.

Le Prince-Araignée ne se sentait pas né pour ce travail. Combien de fois au beau milieu de la nuit, alors qu’il travaillait encore, s’était-il surpris à contempler les étoiles, la forme saugrenue d’une branche ou la chute délicate d’une feuille ? Il se ressaisissait alors et redoublait d’efforts pour être à la hauteur de sa position.

Cependant depuis quelque temps, lorsqu’il levait la tête, il voyait la plus belle de toutes ces délicieuses visions. Un papillon svelte, gai, brillant, coloré et agile, virevoltait tranquillement un peu plus loin auprès des fleurs. Le prince, qui ne voyait habituellement que des araignées sombres et tordues, était fasciné par cette merveilleuse créature. Comment toute la beauté du monde pouvait-elle se résumer ainsi en un seul être ? Et le prince alors ne rêva plus que du magnifique papillon, jour et nuit, et ce rêve lui donna le courage et l’inspiration pour finir sa toile.
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