Critique de Aliette Armel pour le Magazine Littéraire
Brigitte Salino réussit une entreprise délicate : faire le récit, documenté et précis, mais aussi simple et sensible, d'une vie marquée tout autant par la douceur que par la démesure, par la certitude de l'oeuvre à accomplir que par l'angoisse et le désespoir, par la solitude d'un travail littéraire lent et complexe que par des expériences comportant des prises de risques majeurs - voyages dans des pays marqués par la violence (Nigeria, Nicaragua en pleine guerre civile), nuits autour de la gare du Nord à Paris ou dans un hangar le long de l'Hudson à New York, explorant jusqu'à son paroxysme le langage du désir. Cette première biographie de Bernard-Marie Koltès rend compte, sans jugement, d'attitudes alliant séduction et charisme à l'intransigeance et parfois à une certaine injustice, suscitant un très fidèle soutien de la part de sa famille, de ses amis, d'Hubert Gignoux, de Lucien Attoun, de Patrice Chéreau. Dès 1979, ce dernier reconnaît l'extraordinaire originalité d'une langue et d'une vision du monde portées par un théâtre dont il accepte que le sens, parfois, lui échappe. Vécus aux côtés de ses proches, le tragique et les souffrances de la fin de « Bmk » s'estompent derrière la beauté de certaines images et des derniers mots prononcés par Jean Mambrino devant la tombe : « Que les chants des anges te portent à ton suprême repos. »
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