Regarder des gens affolés se ruer sur le dernier hélicoptère américain qui quittait Saïgon nous rendait fébriles. Nous jouions toutes du coude pour mieux voir la scène qui se déroulait à l’écran. Le bruit saccadé des pales des hélicoptères nous électrisait les pieds. Nous aussi éprouvions l’envie de courir. Nous aspirions à nous joindre à cette marée humaine avec ses sacs de toile et ses chapeaux de paille à la main. Imaginez ! Des gens qui, dans leur fuite vers la liberté, n’oublient pas leur chapeau. Et pas n’importe quel chapeau. Un chapeau conique, raide, qui bloque le passage à ceux qu’on abandonne derrière soi. Dans le temps, ma mère en possédait un, mais elle préférait maintenant laisser ses cheveux flotter au vent.