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Citation de MegGomar


En 1948, revenue à Paris, Lucie trouve le clan recasé, pour ainsi dire
recyclé dans la grande lessive qui suit la Libération. Ses oncles sont
désormais installés dans leur nouvelle vie à la blancheur Persil. L’honneur
de la famille est sauf.
L’oncle aîné, Gaston, le « grand journaliste », s’abrite principalement à
Genève.
L’oncle cadet, le pharmacien, est resté à Vichy derrière son officine.
C’est encore là qu’on l’inquiétera le moins.
Le benjamin, petit oncle aux yeux bleus, s’est retiré dans un joli village
au bord de la Manche. Avec sa voix douce qui roule les « r » comme
l’écrivain Colette, il y fait oublier son passé de rédacteur en chef de la
presse de charme, un magazine consacré aux vedettes de cinéma et à
l’actualité des films, version collabo, une publication orgueilleusement
logée à l’adresse même de la Propaganda.
Sous couvert de potins innocents, la publication est un organe de
promotion des films de la Continental, puissante maison de production sous
contrôle nazi, installée en France en 1940 et filiale de l’allemande UFA
(Universal Film Aktiengesellschaft).
Les articles de presse endorment les lectrices afin d’accepter des
réalisations, certes françaises, mais produites par l’occupant. Ce n’est pas
de la politique, c’est du divertissement !
L’oncle a été heureux de ce métier qui lui a permis de multiplier les
maîtresses, allant même jusqu’à vendre la maison de famille en Bourgogne
– la maison natale de Lucie – au moment de la succession de ses parents, en
1943, pour s’acheter une belle voiture de parade avec sa dernière conquête
– dont le clan murmurait qu’elle était juive.
Poussé par Lucie venue lui rendre visite, l’ancien journaliste m’a laissée
feuilleter, enfant, des magazines aux couvertures pâlies. Des visages de
« vedettes du grand film français », vues de trois quarts, au menton levé et
aux sourcils très épilés, attendaient toujours leur heure de gloire.
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