Et puis un matin tu t’es réveillé et c’est terminé. Le rêve avait pris fin. Grand Frère n’était plus Mister Kung-Fu. Les détails sont restés secrets, la version officielle est simplement que ça n’a pas marché. Le résultat pour vous tous : plus de Mister Kung-Fu. Tout à coup, l’âge d’or de Grand Frère avait pris fin, sans tambour ni trompette, sans raison en fait. Officieusement, on comprenait. Il y avait un plafond de verre. Il y en a toujours eu un, et il y en aurait toujours un. Même pour lui. Même pour notre héros, il y avait des limites au rêve d’assimilation, des limites au-delà desquelles aucun d’entre nous ne pouvait prétendre aller dans le monde de Noir et Blanc.
C’était peut-être mieux ainsi. En tout cas pour lui, d’un point de vue personnel. Malgré tous ses succès, Grand Frère n’avait jamais semblé totalement à l’aise à sa place attitrée dans la hiérarchie, il n’avait jamais été vraiment à fond à la poursuite d’une carrière. Il ne se percevait pas comme Mister Kung-Fu. Et il n’avait pas tort. Son Kung-Fu était trop pur, trop parfait pour être exploité comme chacun savait qu’il le serait : des trucs clinquants, débiles, les mêmes mouvements vus des millions de fois mais qu’on lui redemandait encore et encore à chaque mariage et à chaque nouvel an lunaire. Mieux valait qu’il ne connaisse pas la gloire pour connaître la postérité. Mieux vaut être une légende qu’une star.