Pensées nocturnes
Rêvouréalité
Parfois je fais la planche entre rêve et réalité. L’équilibre est difficile à tenir longtemps. Souvent je coule.
Pensées nocturnes
Ubiquité rêvée
Un soir, il m’est arrivé d’avoir ÉGALEMENT envie de lire deux romans achetés ensemble et entamés l’un après l’autre pour la raison anecdotique que l’un se trouvait ici et l’autre là, au gré de mes fréquents changements de cap entre ici et là. Les voyant enfin réunis, l’idée m’a traversé l’esprit un soir, en me couchant un livre dans chaque main, de les lire en même temps. C’était comme un rêve : être emplie, gavée de lecture. Et mes deux héroïnes, qui d’ailleurs avaient à voir l’une avec l’autre, les avoir toutes les deux ENSEMBLE, les faire se rencontrer.
Mais dans la réalité, tandis que je retrouvais celle que j’avais laissée de côté depuis plus longtemps, l’autre est restée sur mes genoux.
Pensées nocturnes
« Un caillou dans la chaussure »
J’ai toujours eu « un caillou dans la chaussure ». Ma mère me disait « toi, ça ne va jamais ! » et mon arrière-grand-mère (elle qui avait survécu à l’épidémie de choléra ayant décimé sa famille et me racontait l’enterrement de Victor Hugo comme si j’y étais) « toi, il te manque toujours deux liards pour faire un sou ! » et c’était vrai, je ressentais en permanence une gêne, un manque. Je n’étais pas assez mûre pour dire qu’en fait je ne me sentais pas à ma place, je n’étais pas d’ici. Ici j’étais à l’étroit, j’avais soif d’autre chose.
Pensées diurnes
Il est 19h30, atterrissage à Montréal
La voix de l’hôtesse nous demande de retarder notre montre de six heures. Nous allons donc revivre les six heures qui nous ont déjà paru si longues. Revivre n’est pas le mot, bien sûr. Ce qu’il faut reprendre c’est le temps, six heures de temps et ça, tu le remplis comme tu veux. Si possible autrement. Quoi de commun en effet entre six heures coincée dans une carlingue et six heures de découverte impatiente…
Pensées diurnes
Tandis qu’on s’éloigne…
Autour d’un feu, les gens ne sont pas les mêmes : non seulement chacun est différent, mais les relations entre eux changent ; quelque chose se dissout et s’élève comme, avec les escarbilles dans l’air du soir. On se sent différent et on sent bien que l’autre à ses côtés l’est aussi. Mais de tout cela on ne se rend compte que plus tard, dans l’odeur persistante de la fumée, tandis qu’on s’éloigne.
Pensées diurnes
Cadeau du ciel ?
Clémence du temps en ce lendemain de catastrophe : maintenant il pleut debout !
DES CHOSES SIMPLES
J’ai envie d’écrire des choses toutes simples,
comme le papier peint de ma chambre :
des feuilles vertes, de toutes petites feuilles vertes
deux par deux accrochées,
accolées plutôt, l’une à l’autre.
Délicatement.
L’une d’entre elles est légèrement plus grande et elle
vient se poser, en se cambrant,
à l’endroit précis où l’autre devient tige en s’amincissant
à l’extrême.
Est-ce que vous voyez cela ?
Pensées nocturnes
Écrire, la mer
C’est joli l’intérieur d’une main qui écrit, avec les doigts recourbés, d’un rose nacré, comme le cœur d’un coquillage. Oui, un coquillage. Est-ce pour cela que j’entends la mer lorsque j’écris, pourtant dans le silence.
Pensées diurnes
Doriane Gray
C’est incompréhensible. Avec toutes ces idées noires que j’ai passé ma vie à ruminer, j’ai toujours gardé un air de fraîcheur, le teint rose, l’œil vif, le nez en trompette… Incompréhensible…
Pensées diurnes
Oxymore de vie
Ce qui me frappe, c’est que les choses peuvent marcher TRES bien sur un fond de catastrophe généralisé.