Claire Dunne

Se tourner vers l'intérieur signifie chercher les signes et les symboles que l'inconscient nous présente en rêve de façon naturelle et spontanée. Les analyser, les interpréter et en faire la "synthèse", les intégrant à notre être, est le travail de notre "Moi" conscient. Le monde de l'inconscient est pour l'essentiel ambivalent, comportant des aspects positifs et négatifs sur tous les plans, ce qui ne le rend pas facile à comprendre. Il commence souvent à se manifester de façon négative, par exemple par e l'ennui ou par un blocage, la vie qui piétine, ou par un coup porté à l'égo, une blessure assenée à la personnalité.

Jung avait l'habitude de répéter à ses amis, "ils m'auraient brûlé comme hérétique au Moyen-âge". Son rapport au christianisme était celui d'un insider/outsider critique, une personne informée et cependant marginale, ayant un point de vue universel sur ces choses.
"(...) Je ne crois absolument pas que le christianisme soit la seule et la plus haute manifestation de la vérité. Le bouddhisme renferme au moins autant de vérité et les autres religions aussi..."

Cet ouvrage nous précipite dans les courants dynamiques internes qui alimentaient la vie et le travail de Jung, les énergies archétypales et la sensibilité aux mythes qui l'habitaient, ne laissant subsister aucun doute quant à leur source spirituelle, ce qu'il appelait le "mystère des mystères", ou le Holy Mysterious, le "sacré mystérieux" selon l'expression des Indiens d'Amérique. (...)
Il a montré que toute vie est ancrée dans le mythe et nous fait évoluer vers une source spirituelle et un plus grand devenir. (...) Le mythe n'est pas un concept vide, un feu follet. (...) Il nous livre la clef de notre existence personnelle dans l'histoire; sans les clés mythologiques, nous n'aurions ni culture, ni religion, ni art, ni architecture, ni théâtre, ni rites épique, ni us et coutumes, ni désordres mentaux comme Jung n'a cessé de nous le montrer. Nous habiterions un monde gris, ennuyeux avec rien pour nous appeler vers le pays étrange et magnifique qui nous échappe alors même que nous essayons de l'atteindre.

(...) Mon seul désir est que les théologiens s'intéressent également à la kabbale, à l'Inde, à la Chine pour décrire encore plus précisément la révélation de Dieu et pouvoir la proclamer. Si cela conduisait à relativiser en un certain sens le christianisme, cela se ferait in majorem dei gloriam et ne porterait pas atteinte à la doctrine chrétienne..."

Il se peut que nous regardions le monde du mauvais côté et que la bonne réponse soit à trouver en changeant de point de vue en regardant depuis l'autre côté, c'est-à-dire non pas de l'extérieure, mais de l'intérieur.

"Les deux choses qui m'avaient le plus touchée dans son travail autobiographique étaient, d'une part, sa conviction que la psyché est « par nature religieuse », et d'autre part, sa description des deux personnalités vivant et luttant en nous, celle que nous sommes par nature et celle que nous devenons pour nous adapter à notre environnement culturel, familial et social. Le jeu des opposés que Jung découvrit très agissant en lui se joue aussi dans nos propres vies.

En écrivant sur la vie de Jung, j'ai voulu, autant que possible, qu'il raconte sa propre histoire. Sa correspondance révèle aussi bien sa personnalité que la pensée distillée de son travail, ses mots encore porteurs de son énergie: c'est cela, et les extraits tirés de son autobiographie et de l'ensemble de ses ouvrages, qui ouvrent la porte sur son Monde.

Au cours de sa longue vie, et à travers de nombreuses difficultés, Jung s'est forgé une totalité d'être et il nous invite à mener cette autoréalisation comme la tâche essentielle de nos vies, bâtie à notre façon, nous conduisant vers les fondements spirituels de notre existence." (Extraits de présentation par l'auteur de la biographie).

Selon Jung, "seul le médecin blessé peut guérir", et ce, dans la mesure où il s'est guéri lui-même.

Jung était (...) le premier psychiatre moderne a reconnaître que la psyché humaine est "par nature religieuse" et à l'explorer en profondeur.
Se décrivant lui-même comme un "empiriste" et "guérisseur de l'âme", il a pénétré ses propres profondeurs et celles de ses patients, relié son expérience aux écrits anciens et aux cultures du monde entier, et a livré ses découvertes à un monde qui ne le comprenait pas.
Il écrivit dans une lettre: "(...) Ce qui m'intéresse avant tout dans mon travail n'est pas de traiter les névroses mais de me rapprocher du numineux (qui)...est la seule véritable thérapie."

Dès le début en 1933, Jung joua un rôle décisif dans les conférences internationales et multidisciplinaires d'Eranos, d'où ol lança ses nouvelles idées pendant près de vingt ans. Les théories de Jung commençaient à être appliquées à des disciplines très divergentes -en théologie, en sciences politiques, à la jurisprudence et à la littérature. Hermann Hesse adopta les idées de Jung dans plusieurs de ses romans, tout comme H.G. Wells, qui rendit hommage à sa pensée en disant "une lumière brillante dans mes ténèbres et une mine d'or pour la réflexion".

Jung disait que nous vivons "sur un ou deux étages" de notre être conscient et sommes à l'écart de tout ce qu'il y a d'autre en nous. Le processus d'individuation nous pousse à connaître notre nature inconsciente telle qu'elle s'exprime en nous à travers le langage des symboles que nous observons avant tout dans nos rêves.