Claude Griesmar n'a pas son pareil pour décortiquer l'âme humaine, ses petites et grandes mesquineries, et cela en s'infiltrant dans tous les milieux. L'R de rien est avant tout une plongée dans la tête d'un personnage complexe, cynique, odieux, qu'il arrive à nous rendre attachant. Là est ce pari audacieux. Son autre atout est de nous narrer un florilège de rencontres aussi caustiques et croustillantes les unes que les autres. Raymond, misanthrope avéré, sous son "R" aimable, ne cesse de dezinguer les uns après les autres ses collègues, voisins et tous les pauvres hères qui fréquentent son chemin. Mais Raymond possède la qualité d'épargner les enfants. Merci Raymond !
Dans ce livre-monde, à travers une foule d'individus (que nous supportons tous), l'auteur nous démontre son grand art de la psychologie. Un roman réjouissant et addictif. Bravo Claude Griesmar !
" Ce connard ne s'est pas sacrifié pour nous permettre de vivre nos passions ! Le salaud. Il voulait nous utiliser pour exister. Lui. Pour être quelqu'un. Pour épater les autres. Et surtout pour amasser un max de pognon. C'était ça, son but : devenir riche. L'enfoiré. Il nous en a fait baver.
[...] Tu le constateras par toi-même, Marc-Antoine, la vie n'est qu'une succession de problèmes, plus ou moins ardus, plus ou moins intéressants, plus ou moins amusants, plus ou moins décisifs. À toi de les prendre à bras-le-corps. Affronte-les avec détermination et balaye-les de ton chemin, et tu grandiras! Si tu passes ton temps à essayer de les éviter, à te cacher, à te plaindre, tu n'aboutiras à rien de satisfaisant. Tu subiras ta vie au lieu de la construire. Tu comprends ?
Ces soixante-cinq autres scribouillards à la
recherche de reconnaissance pour leur talent
et de visibilité pour le fruit de leur travail ont
en même temps revêtu le costume de membres
d'un clan précieux. J'étais fier et soulagé
d'appartenir à cette vaste famille d'artisans des
mots et créateurs d'histoires. [...] Une immersion
dans un nouveau monde. Des premiers pas dans
un univers merveilleux. Et le meilleur était à venir.
Je m'ennuyais tellement. Ces sujets futiles et répétitifs me fatiguaient. J'aurais aimé parler du dernier Stephen King. De l'âme des arbres. D'un adjectif étonnant trouvé par hasard dans un poème incompréhensible d'un illustre inconnu. D'une chronique littéraire vantant les mérites du roman d'un obscur écrivain slovène. De la perception des nuances de violet. De mots intraduisibles d'une langue à l'autre. [] Ou même de mes écrits.
Je suis un anonyme, entouré d'anonymes,
dans une petite ville anonyme.
Mais j'existe.
- L' anatidaephobie ! a-t-il récité. La peur que quelque part, d'une façon ou d'une autre, un canard vous observe. Oui, c'est précisément cela, l'anatidaephobie. Vous reconnaissez les symptômes, monsieur Descroux ?
- Évidemment !
Nous nous étions trouvés. Nous avons sympathisé et sommes restés en contact. C'est cette rencontre qui a été importante pour moi dans le concours des Plumes Précieuses. J'avais un ami désormais. Je n'étais plus seul.
Le 25 mai 1988, le ciel lui est tombé sur la tête deux fois. Filomena lui a offert une fille et le Benfica a perdu sa finale. Une fille !
Et pour finir, il y a ceux qui pensent savoir. Les rêveurs. Les enthousiastes d'un jour. Les Daniela en puissance.