Clément Zugetta

Entamer la lecture d'une nouvelle de Clément Zugetta dans son recueil «Nouvelles d'une humanité en crise» revient à entrer dans un univers fait d'étrangeté. Lecteur, toi qui t'aventures dans ces récits, sache que tu ne seras pas rassuré mais troublé, bousculé et déconcerté. Ces nouvelles sont noires dans la grande tradition des récits comme ceux de Lovecraft ou Edgar Poe. Les images sont dures, brutales parfois, baroques toujours. La violence y est omniprésente et les relations avec les autres troubles. C'est Hobbes revisité, la « guerre de tous contre tous » mise en récit.

Dès les premières lignes, on ne sait où se situe l'action, idem pour le temps. En tant que lecteur, nous sommes plongés au milieu d'une intrigue, in medias res, en plein coeur de l'action. Pas de préliminaires rassurants, ni de quiétude. Nous nous voyons perdus comme le sont les personnages de ces récits. Ils vivent dans un monde quasi labyrinthique, sous le signe de Dédale, parfois apocalyptique. Le monde dont ils ne perçoivent que quelques bribes leur paraît hostile, fait de toutes sortes d'obstacles, d'entraves et de menaces. Ils ressentent comme l'écrit l'auteur dans l'un des récits « toute la pitié et l'impuissance du monde à aider son prochain ». On peut penser à l'univers d'un Cormac McCarthy ou encore à des personnages hitchcockiens pris dans une histoire qui les ballotte sans espoir de solution heureuse qui pourrait nous apaiser à la fin.

Dans ses récits, on découvre des situations les plus diverses. Un homme cherchant à sortir de toutes ses forces d'un endroit où il est englouti mais qui ne sait ce qui l'attend. Un animal encagé dont on suit le destin immanquablement tragique. Ou encore, une jeune femme sous les bombes essayant de sauver son enfant et son amie, puis qui trouve refuge dans un monde chtonien où elle rassemble fébrilement des souvenirs de la vie d'autrefois…

Si le mot « étrange » n'existait pas, il faudrait l'inventer pour les nouvelles de Clément Zugetta. Et l'on ressent tout un plaisir rare, insolite et singulier à entrer dans son univers, ce qui fait le charme de toute grande lecture.