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Citation de Partemps


approche de l’arbre


Tout au long, j’ai marché d’un pas de rivière
dans le courant, j’ai marché au fil de l’air, au fil des mots, sur le souffle
marché jusqu’ici, sur mon erre, jusqu’à maintenant
« demain », « ailleurs »… c’était une pensée d’hier
« maintenant », « ici », a pris sur moi, c’est une pensée d’arbre
dans l’ébranlement de l’arrêt, arbre me voici
tout au long, peut-être, ai-je porté en moi cet arbre
tacite, en attente
tout au bout de l’égarement, comme je touche l’arbre, je me reconnais
à bout de course, à bout de souffle, je reprends pied, je reprends terre
la terre prend sur moi, les ténèbres de la terre, son étreinte insatiable
à mesure que baisse en moi le jour, l’arbre en moi s’éveille
et dans mon corps s’éploie, comme un sommeil, l’immensité interne
de l’arbre
tout au long, jusqu’à finir, l’arbre soutient ma patience
tout au long, de sa lenteur subtile
à présent, à cette lenteur, je me reconnais: c’est de ce pas que je
parcours de bout en bout l’instant
comme jadis, dans l’ombre pâle des mélèzes, mon haleine suspendue
comme, du fond de mes entrailles, j’entrais dans la danse du grand
chêne échevelé, tournoyant au fil des siècles
jusqu’à me dissiper dans son ralentir vertigineux
comme, aussi, se jouait le bonheur de l’instant dans le rayon de soleil
tressautant comme dé sur la paume frémissante de l’érable
alors, tout à coup, s’éclairait ton visage dans mon regard
puiser au fond de soi un geste comme pensée, comme sève, pour le porter
à travers l’air, le soutenir tout au long des temps sur son élan, sa sincérité
dire ainsi ce que je sais
cette immobilité qui me gagne, me gorge des eaux du sol profond, cette
félicité comme de larmes
à l’aveugle, je suce la mémoire de l’humus, la sève de mes mots
et si je dis « à présent », n’est-ce pas l’arbre en moi qui parle ?
qui donne une gorge, une voix à l’air fugitif ?
sur les lèvres, tout un bourgeonnement, tout un feuillage de mots tus
l’arbre en moi, c’est l’oubli, les mots de l’oubli, ce bruissement de brise
dans la ramure
« ici », « à présent », léger dans la conversation des arbres
j’étreins devant moi mon absence comme de branches la nuit.
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