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Citation de ChedevC


Illusion lyrique, nostalgie et aventurisme, manipulation, voilà comment, le péril de mai conjuré, on exorcise, à droite, les démons révolutionnaires, puisque aussi bien ils sont trop virulents pour qu'on ose leur faire face. Quitte d'ailleurs à tirer gloire, au nom d'une France à l'esprit impérissable, et en vertu d'un nationalisme éclairé, de ce peuple "léger, brillant, ... toujours semblable à lui-même en ses retournements soudains."
A gauche cependant, on exploite, on canalise, on se renfloue, on vend aussi la peau de l'ours...
Et de nouveau, le cortège des conformismes et des calculs de toutes espèces, de toutes familles politiques, se déploie autour des vieux slogans. L'immense tartuferie sociale, un moment prise au piège de la vérité nue, préfère, sans vouloir la comprendre, intégrer la contestation.
Hier, chacun parlait de la nécessité de réformer l'université. La gauche accusait le régime gaulliste de n'avoir rien fait depuis dix ans, pour mieux masquer sa propre impuissance. Le pouvoir brandissait le hochet de la réforme Fouchet, et s'ingéniait à briser l'UNEF, parce qu'elle ne se laissait pas abuser. Une partie du corps enseignant ronronnait dans sa paresse intellectuelle, son manque d'imagination, son parti pris de ne rien changer qui eût conduit à bouleverser ses habitudes de pensée et son cadre de travail.
Vinrent les jours de colère. Tout bascula, la fougueuse Nanterre, la Sorbonne exemplaire, le corps entier de l'université bourgeoise. L'ordre établi s'effondra dans les barricade. La révolte déferla sur les usines. L'Etat semblait se dissoudre. La société craquait.
Un instant terrassé, le général-président se redressa pour défier le « chaos ». Le nombre de ses fidèles se gonfla de tous les rescapés de cet affreux cauchemar. Et la vie reprit. En dépit des récalcitrants, les travailleurs retrouvèrent peu à peu le chemin des usines, les employés celui des bureaux, les citoyens celui des urnes. Tout rentra dans l'ordre, puisque aussi bien un général est fait pour commander, une opposition pour élire.
Et les étudiants ne sont-ils pas faits pour étudier ? Alors, qu'attendaient-ils pour emboiter le pas ? Pourquoi cette réticence à accepter la règle du jeu, ce refus de se voir octroyer leur réforme, cette obstination à vouloir bouleverser une société qui s'y refusait ?
Pour eux, les solutions de rechange n'existent pas. L'ordre ancien a vécu. A l'université du moins, nul ne pourra le restaurer. Il faudra bien leur accorder tôt ou tard la réforme totale des structures sur des bases d'autonomie et de cogestion. Mais puisque l'université n'a plus de frontières, puisqu'elle est en prise directe sur la société, puisque la jonction s'est opérée, vaille que vaille, entre les étudiants et les ouvriers, l'action révolutionnaire ne se confinera pas dans le domaine réservé de l'intelligentsia. Tout phénomène politique aujourd'hui s'intensifie par les effets de masses et de contagion. Et le procès de la société tout entière est désormais ouvert.
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