Danièle Jankowski

Gabrielle dérangeait fatalement plus d’une personne. Son caractère bien affirmé, sa nature rêveuse, sa joie de vivre et ses passions « à fleur de peau » tellement éloignées des aspirations bassement matérialistes de la majorité des habitants les dépassaient totalement. Comme à l’époque d’Eugénie, ils ne toléraient ni leur différence ni leur originalité qui les élevaient toutes les deux au-dessus de la majorité d’entre eux.

La vie à la campagne est tellement différente de celle que l’on mène à Paris, que la présence d’un animal de compagnie semble plutôt sécurisante... Si vous me donnez la permission d’accueillir mon propre chien, rassurez-vous à ce sujet : mon choix se portera inévitablement sur une femelle pour éviter les problèmes de bagarre avec Valmy. Cela va de soi...

Tout comme elle avait naguère résisté à ses parents lorsqu’ils lui conseillaient de choisir un autre métier plus féminin, plus prestigieux également. Ses années d’études au lycée avaient démontré qu’elle était une élève douée, promise à un brillant avenir. Mais personne n’avait pu la détourner de ce projet professionnel, caressé depuis la classe de première : elle serait architecte un point c’est tout, et ne s’intéresserait à rien d’autre... Sinon, elle préférait tout abandonner.

Sans qu’elle sût comment la chose avait pu se produire, Gabrielle sentit tout à coup qu’on lui effleurait légèrement l’épaule droite. C’était comme une caresse d’une infinie douceur... Alors elle réagit immédiatement, redoutant d’avoir affaire au sinistre individu qui l’avait importunée quelques minutes auparavant. Déjà sur la défensive, elle se retourna d’un seul coup, prête à repousser les avances audacieuses du goujat opportuniste, la mine en colère, presque agressive.

La jeune architecte recherchait autre chose, aspirait à donner un autre sens plus réel, à son existence. Celle qu’elle était en train de mener lui apparut remplie d’illusions et de futilités sans nom, tellement superficielle ! Ce n’était pas cela la vraie vie, celle où l’on se destine à accomplir de grandes choses, à concrétiser ses plus belles passions, à atteindre le dépassement de soi pour se sentir pleinement exister...

Nous avons fait connaissance, c’est l’essentiel. Il faut qu’il se familiarise avec mon odeur. C’est la même chose avec les chevaux, le premier contact est souvent déterminant...